2018
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Études françaises ; vol. 54 no. 2 (2018)
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Jean-Benoit Cormier Landry, « « Passer le générique » : Intertextualité et (dés)engagement dans Baise-moi de Virginie Despentes », Études françaises, ID : 10.7202/1050590ar
Sur la base d’un rappel de la réception particulière dont a bénéficié la parution, au mitan des années 1990, de Baise-moi (Paris, Florent Massot, 1994), le premier roman de Virginie Despentes, cet article propose une analyse de la dimension autoréflexive du roman avec pour point d’ancrage la scène, centrale dans l’oeuvre, du meurtre du personnage de l’architecte. Il a pour objectif de mettre en lumière les stratégies intertextuelles à l’oeuvre dans le texte qui, en s’articulant aux tactiques éditoriales et de mise en marché du livre au moment de sa parution, ancrent Baise-moi dans le champ des productions culturelles de son époque d’une manière oblique. Dans la perspective ouverte par l’analyse, Baise-moi apparaît, sur les plans esthétique, historique, tout comme sur celui des « politiques de la littérature », dans un fonctionnement dialectique où la surexposition brutale des corps sensibles, sexués et violents ne s’oppose plus à l’entreprise intellectuelle, où la négation forte d’un attachement à l’époque est indissociable d’une inscription complexe dans l’histoire (littéraire et plus largement culturelle) où sont consommés (détruits et assimilés) les codes, les frontières et les hiérarchies d’oeuvres, de médias et de pratiques qui sont ceux d’une modernité faussement porteuse d’émancipation et dont le roman de Despentes dresse un portrait lucide et violent, où ont part simultanément la destruction et l’hommage.