2015
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Revue québécoise de droit international ; (2015)
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Alberto Costi, « L’ARRÊT DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE DANS L’AFFAIRE DES IMMUNITÉS JURIDICTIONNELLES DE L’ÉTAT », Revue québécoise de droit international / Quebec Journal of International Law / Revista quebequense de derecho internacional, ID : 10.7202/1067985ar
Cet article offre une critique de l’arrêt de la Cour internationale de justice (CIJ) sur l’immunité juridictionnelle de l’État en matière de procédure civile rendu le 3 février 2012. Opposant la République fédérale d’Allemagne à l’Italie, l’affaire concernait l’immunité de juridiction de l’Allemagne devant les instances judiciaires italiennes suite à la commission de violations graves du droit international humanitaire perpétrées par le Reich allemand contre des ressortissants italiens et grecs au cours de la Seconde Guerre mondiale. La Cour trancha en faveur de l’État allemand, affirmant dans son jugement majoritaire que la République italienne avait manqué à son obligation de respecter l’immunité reconnue à l’Allemagne par le droit international. Nous introduisons d’abord brièvement la règle de l’immunité de l’État, relatant son historique et son évolution. Nous décrivons ensuite les faits de l’affaire, les arguments des parties et la décision de la CIJ. Suit une analyse de l’arrêt en deux temps. En premier lieu, nous faisons valoir que, de lege lata, le jugement de la majorité fondé sur un raisonnement positiviste reflète l’état du droit international coutumier en matière d’immunité de l’État. En deuxième lieu, nous nous demandons s’il ne faudrait pas, de lege ferenda, reconnaitre une exception à l’immunité de l’État pour des violations des normes de jus cogens, lorsqu’il n’y a pas de voies de recours alternatives. Finalement, nous sommes d’avis que l’émergence d’une telle exception parait actuellement peu probable en marge de la pratique des États, et que le jugement de la CIJ pourrait ralentir, voire ossifier, l’évolution du droit en la matière. Avec cette contribution, nous avons voulu rendre hommage au professeur Jacques-Yves Morin, dont les classes nous inspirèrent à poursuivre une carrière académique dévouée au jus inter gentes.