2020
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Santé mentale au Québec ; vol. 45 no. 2 (2020)
© Département de psychiatrie de l’Université de Montréal, 2021
Rahmeth Radjack et al., « Les mineurs non accompagnés : des destins individuels qui interrogent le politique », Santé mentale au Québec, ID : 10.7202/1075390ar
Objectifs À travers la description et la discussion d’une situation d’un jeune isolé étranger d’origine marocaine venu seul en France à 17 ans, nous transmettons des éléments de compréhension et des outils transculturels pour faciliter l’émergence d’un récit et d’un lien de confiance avec les professionnels qui l’accompagnent. Une créativité s’impose dans la prise en charge des jeunes isolés étrangers, car la famille est à distance, et les obstacles à la mise en place d’un lien de confiance dans l’accompagnement éducatif sont nombreux (liés aux expériences du passé et aux traumatismes psychiques).Méthode Nous décrivons un dispositif d’accueil transculturel adapté à ces jeunes, qui se base sur le principe de narrativité en utilisant divers supports de narration et de médiation (objets, circle test, médiateurs-interprètes, propositions transculturelles). Nous favorisons ainsi l’émergence d’un récit biographique initialement difficile d’accès face au statut particulier de la parole dans ce contexte.Résultats La discussion se fait sous 3 angles : anthropologique avec un éclairage sur la situation spécifique des harraga qui sont des jeunes en errance à la fois psychique et physique, l’angle politique, et la clinique du psychotraumatisme. Sur le plan du travail éducatif, la mise en valeur et l’approfondissement des compétences transculturelles des professionnels permettent de pallier un sentiment d’épuisement ou d’échec, et à terme, mieux accompagner ces jeunes. Les modalités d’accueil et nos manières de les soigner interrogent notre relation à l’autre, à nous-mêmes, au lien social et au politique.Conclusion Une approche transculturelle peut aider le jeune à renouer un processus de construction identitaire loin de ses repères, en pleine période d’adolescence. Cela suppose de retrouver une cohérence dans le parcours des jeunes malgré la rupture de la migration, souvent réactivée par de nouvelles séparations lors des changements réguliers de lieux de vie. Les jeunes isolés étrangers ont la possibilité, dans le cadre de ce dispositif, de montrer une juste représentation d’eux-mêmes, d’élaborer des récits qui échappent aux représentations préconçues liées à leur statut et de construire leurs destins individuels.