2021
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Relations industrielles / Industrial Relations ; vol. 76 no. 3 (2021)
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Andrea Talarico, « Technological Strikebreaking: A Case Study of Quebec’s Anti-Scab Legislation », Relations industrielles / Industrial Relations, ID : 10.7202/1083614ar
Le droit de grève a reçu une protection constitutionnelle au Canada en 2015. Dans certaines juridictions où le droit de grève est explicitement protégé dans la constitution, l’interdiction du recours aux briseurs de grève est reconnue comme découlant de ce droit constitutionnel. Seules deux provinces canadiennes interdisent le recours aux travailleurs de remplacement durant une grève ou un lockout. Au Québec, cette interdiction s’applique au sein de l’établissement de l’employeur. Le concept mal défini d’établissement a été interprété par des tribunaux et des arbitres comme se limitant au lieu physique de production, sans égard pour les avancées technologiques qui permettent aux travailleurs d’oeuvrer à distance. Cet article examine comment une telle interpretation restrictive facilite une forme de recours aux briseurs de grève qui avait été identifié par la cour constitutionnelle espagnole, à savoir les briseurs de grève technologiques (esquirolaje technologico), soit le recours à la technologie pour contourner les restrictions prévues à la loi même lorsqu’il ne s’agit pas de technologie généralement utilisée. L’impact de la technologie est examiné au moyen de deux études de cas: les lockouts successifs au Journal de Québec et au Journal de Montréal. Durant ces lockouts, les publications ont continué de façon ininterrompues grâce à des collaborateurs externes qui fournissaient du matériel électroniquement. En utilisant le modèle de Kochan et Katz, cet article examine comment les briseurs de grève technologiques ont modifié l’équilibre de pouvoir, ont affecté le niveau stratégique de négociation et ont eu des impacts considérables sur l’issu du lockout. Enfin, même si les lockouts ont mené à des appels de réforme législatives en 2011, de telles réforme ne sont pas nécessaires pour que les dispositions antibriseurs de grève rencontrent leur objectif initial, à savoir la réduction de la durée des conflits de travail.