Michel Foucault, de la « pensée du dehors » au « capital humain »

Fiche du document

Date

2022

Discipline
Type de document
Périmètre
Langue
Identifiant
Relations

Ce document est lié à :
Cahiers Société ; no. 4 (2022)

Collection

Erudit

Organisation

Consortium Érudit

Licence

© Collectif Société, 2022



Citer ce document

Gilles Labelle, « Michel Foucault, de la « pensée du dehors » au « capital humain » », Cahiers Société, ID : 10.7202/1098603ar


Métriques


Partage / Export

Résumé Fr En

Une fréquentation même sommaire et partielle de l’immense littérature qui a été consacrée à Michel Foucault révèle qu’elle repose en grande partie sur une décontextualisation de l’oeuvre. Dans un souci de contextualiser celle-ci, je défendrai trois arguments : 1) le rejet de la « pensée dialectique », dont la phénoménologie est le cas le plus récent suivant Foucault, doit être considéré comme structurant tout son travail, de l’Histoire de la folie à l’âge classique à l’Histoire de la sexualité et au cours de 1979 consacré au libéralisme et au néolibéralisme. 2) Cette posture constitue une prise de position à l’égard des principes qui structurent ce qu’on peut désigner comme le monde moderne ou la modernité. À la pensée dialectique, Foucault oppose d’abord ce qu’il désigne comme « pensée du dehors », qui correspond à ce que Hegel désignait comme « pensée de l’entendement » en ce qu’elle pose l’existence d’oppositions irréductibles et indépassables. L’exemple paradigmatique de cette pensée désignée par Hegel comme pensée du « ou bien… ou bien… » est donné dès le départ de l’oeuvre de Foucault : ou bien la déraison (dont la folie est un cas), ou bien la raison. Ce qui est dès lors rejeté est l’idée de synthèse ou de réconciliation entre les éléments contradictoires dont hérite la modernité (par exemple entre l’idée de totalité et celle de liberté), qui caractérise selon Foucault la pensée dialectique dans ses diverses déclinaisons, hégélienne, marxienne et phénoménologique. 3) Cette prise de position à propos de la pensée dialectique et de la modernité permet de situer Foucault dans l’actualité immédiate où s’est déployée son oeuvre – la critique de la colonisation d’abord, le gauchisme post-soixante-huitard ensuite, ce qu’on peut désigner comme le « post-gauchisme » enfin – et éclaire en partie au moins la réception dont elle a fait l’objet.

Even a summary and partial investigation of the immense literature that has been devoted to Michel Foucault reveals that it is largely based on a decontextualization of his work. In order to contextualize it, I will defend three arguments: 1) the rejection of “dialectical thought”, of which phenomenology is the most recent case according to Foucault, must be considered as structuring all his work, from Madness and civilization to The History of sexuality and to the 1979 course devoted to liberalism and neoliberalism. 2) This posture constitutes a position taken with regard to the principles that structure modernity. To dialectical thought, Foucault first opposes what he designates as the “thought from the outside” (“pensée du dehors”), which corresponds to what Hegel designated as “mere understanding” (“pensée de l’entendement”) in that it posits the existence of irreducible and unsurpassable oppositions. The paradigmatic example of what Hegel also designates as the thought of “either/or” is given from the start of Foucault’s work: either unreason (of which madness is a case), or reason. What is therefore rejected is the possibility of a synthesis or a reconciliation between the contradictory elements which modernity inherits (for example between the idea of totality and that of freedom), which characterizes, according to Foucault, dialectical thought in its various versions, Hegelian, Marxian and phenomenological. 3) This stance on dialectical thought and modernity allows us to situate Foucault in the immediate context in which his work unfolded: firstly the critique of colonization, then “post ‘68 leftism”, and finally what we can designate as “post-leftism”. This contextualization sheds light at least in part on the reception to which it has been subjected.

document thumbnail

Par les mêmes auteurs

Sur les mêmes sujets

Sur les mêmes disciplines

Exporter en