24 avril 2009
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Nathalie Bantz, « Les nouvelles de Thomas Hardy. Choix stratégiques d'une écriture sous contrainte », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.00oujn
Thomas Hardy souhaitait que l'on se rappelât de lui comme poète. Sa réputation fut cependant bâtie sur ses romans. Partant de là, ses nouvelles, à la fois proches et différentes de sa production romanesque et poétique, offrent une perspective unique sur l'ensemble des écrits. Cette thèse se propose ainsi d'étudier les choix d'écriture en matière de discours narratif et de posture du narrateur. Il s'agit de comprendre de quelle façon les nouvelles, négligées au moins jusqu'aux travaux récents de Kristin Brady (The Short Stories of Thomas Hardy. Tales of Past and Present, 1982) et de Martin Ray (A Textual History of Hardy?s Short Stories, 1997), s'insèrent dans l'oeuvre et y trouvent leur juste place. Des analyses, menées au moyen de la narratologie de Genette ainsi que de la théorie de l'énonciation, montrent qu'une stratégie d'ensemble régit les choix en direction du narrateur. Il apparaît que toute ambivalence ou signe contradictoire surgissant ça et là relève encore de cette stratégie, laquelle est au service du projet d'écriture : raconter une histoire tout en faisant état de ce que Hardy nomme « les relations entre les sexes ». Au vu des contraintes et des codes auxquels la fiction et plus particulièrement le roman, doit se plier au cours de la période victorienne, une telle ambition semblerait vouée à l'échec, n'était la liberté offerte par la nouvelle, un genre dont l'étude formelle est alors en cours de développement. Au cours de l'étude, les nouvelles, en raison des différentes stratégies narratives qu'elles développent, émergent comme un espace médian faisant lien entre les romans et les poèmes : les premiers relèvent d'un genre alors trop codifié, et les seconds sont le lieu d'une liberté que l'auteur juge totale : « Perhaps I can express more fully in verse ideas and emotions which run counter to the inert crystallized opinion ».1 Au final, les nouvelles apparaissent comme une part essentielle de l'oeuvre, à égalité avec les romans et les poèmes qu'elles mettent en dialogue. Leur étude permet de comprendre les raisons qui ont incité l'auteur à mettre fin à sa carrière de romancier, alors même qu'il a poursuivi la rédaction de nouvelles jusqu'au début du vingtième siècle. Elle explique aussi pourquoi seule la poésie permettait à Hardy d'accomplir sa mission de raconteur d'histoires et d'observateur de la société de son temps. Enfin, et ce n'est pas le moindre de leur intérêt, les nouvelles offrent une occasion rare de considérer de plus près la figure qui abrite ce qui est communément appelé « l'auteur dans le texte ».