23 novembre 2009
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Thomas Augais, « Trait pour trait : Alberto Giacometti et les écrivains par voltes et faces d’ateliers », Theses.fr, ID : 10670/1.062q39
L’œuvre d’Alberto Giacometti a posé avec acuité le problème de la représentation. Dès 1929, un article de Michel Leiris appelle sa mise en question de la « figure humaine » à venir dialoguer dans l’espace de la revue Documents avec une pensée dialectique de l’image, celle de Georges Bataille. Il rejoint ensuite le groupe surréaliste en abandonnant pour un temps la représentation figurative au profit du « modèle intérieur » prôné par André Breton. Son retour au modèle extérieur contredit le sens de l’histoire de l’art pour Breton et lui vaut d’être exclu du groupe surréaliste. Pourtant Giacometti dans ce retour au réel n’abandonne pas le pôle subjectif, il choisit au contraire de l’assumer dans ses plus extrêmes conséquences, en refusant dans sa représentation de l’objet d’être plus précis que la perception. Son œuvre suscite alors après-guerre l’attention des philosophes car elle rencontre les recherches de la phénoménologie. Mais elle attire surtout l’attention de nombreux écrivains à mesure que l’impossibilité d’atteindre son but, faire une « tête vivante », conduit Giacometti à faire de son art une méditation sur le sens de la représentation de la réalité en art. Admettant le caractère inéluctable de l’échec auquel est confronté celui qui veut saisir le réel, il choisit d’approfondir le « pourquoi » de cet échec. Son œuvre devient alors le lieu d’une critique acérée du langage, perçue comme le meilleur moyen d’affronter l’écart entre les signes (plastiques ou langagiers) et les objets du réel. Les écrivains tentent de mesurer les conséquences poétiques de cette approche du réel qui envisage l’art comme un moyen de se rendre compte de ce que nous voyons.