2002
Cairn
Sylvie Lapalus, « L'affaire Claude C. ou la subversion des rôles », Sociétés & Représentations, ID : 10670/1.0lpnd6
À Lyon, le 8 juin 1903, Claude C., ouvrier passementier de 27 ans, tue sauvagement sa mère pour la dépouiller de ses économies : une affaire criminelle ordinaire si ce n'est que le coupable se comporte comme un véritable trublion. Tout au long de la procédure judiciaire, en effet, Claude C. ne cesse de bousculer la hiérarchie judiciaire en cherchant tour à tour à se substituer au juge d'instruction, aux experts médicaux ou encore à l'avocat de la défense. Ce renversement des rôles débouche même sur une totale inversion des responsabilités puisque c'est la victime elle-même qui est mise sur la sellette par son fils. Car pour Claude C., la vraie victime, c'est lui, d'où la vanité de son procès qui ne serait plus qu'une vaste supercherie. Contrastant si radicalement avec celle de l'accusé repentant, une telle attitude ne manque pas de choquer les contemporains surtout en ces temps où le crime cristallise les angoisses de toute la société. Malgré tout, ultime renversement dans cette affaire, la justice de la Belle Epoque ne reste pas complètement insensible à la force insidieuse du discours de ce parricide puisqu'après l'avoir condamné à la peine capitale, elle commue sa peine en travaux forcés à perpétuité.