18 novembre 2024
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Clara Berdot, « Écritures du maître et du disciple chez Proust et Borges », HAL SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), ID : 10670/1.17e912...
Ce travail a pour objet l’étude de figures de maîtres et de disciples à travers l’œuvre de Marcel Proust et celle de Jorge Luis Borges. Cette recherche part de l’hypothèse que la réflexion sur ces figures, dans la fiction comme dans la réception des œuvres et des auteurs, peut mettre en lumière une reconfiguration de l’autorité et de l’auctorialité qui est indissociable d’une mutation de la conception du savoir et du sujet au cours du siècle dernier. Intituler cette thèse « Écritures du maître et du disciple chez Proust et Borges », au pluriel, montre qu’il s’agit d’embrasser à la fois le plan textuel (représentation, description et mise en scène des maîtres et des disciples dans la fiction) et le plan méta-textuel. Le pluriel tient également compte des métamorphoses, dans l’écriture, des rapports entre plusieurs couples qui se font écho sans se confondre : maître/disciple, écrivain/lecteur (« écrivain » entendu comme individu réel écrivant des œuvres littéraires) et auteur/lecteur (« auteur » entendu comme instance primaire de production et d’énonciation du texte).Un premier axe s’intéresse à la place des maîtres dans le champ littéraire et social, à travers la construction discursive, liée au mythe et à l’affect, d’une forme de magistralité attribuée à Proust et Borges par leurs pairs, par leurs lecteurs et par les critiques. Leur statut de « maîtres écrivains » est par ailleurs corrélé à leur intégration progressive, au fil du XXe siècle, dans un canon littéraire, malgré leur reconnaissance relativement tardive et les polémiques qu’ils ont tous deux suscitées.Un deuxième axe explore les nuances de la palette magistro-discipulaire au sein des fictions de Proust et de Borges : différents modèles défilent en effet dans leurs pages, tant chez les personnages que chez les narrateurs. Les scènes et les portraits permis par le surgissement dans la diégèse de ces figures donnent à voir non seulement différents rapports didactiques propres à la dialectique maître-disciple et la complexité des liens existant entre savoir et pouvoir, mais aussi des perspectives épistémocritiques faisant des maîtres et des disciples les représentants fictionnels d’une véritable économie du savoir.Un troisième axe tient compte de la portée métatextuelle de la relation du maître et du disciple, ce qui permet de soulever des questions relatives aux mécanismes de la fiction, au rôle des lecteurs et au pacte de lecture proposé (ou supposé) par un texte littéraire. L’analogie entre les couples narrateur/lecteur et maître/disciple doit être explorée : le jeu et les variations que Proust et Borges proposent autour de ces figures semblent étroitement liés aux métamorphoses de la conception et de la pratique de la fiction narrative et de la lecture.