1 janvier 2006
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Isabelle Charpentier et al., « Réseaux de sociabilité et circulation matérielle et symbolique des produits culturels en milieux populaires », HAL-SHS : sociologie, ID : 10670/1.19j7iy
La relation entre l'offre culturelle sous ses formes multiples et la structuration des goûts, attentes et pratiques des consommateurs n'est pas uniforme. Nonobstant l’élévation continue du niveau de scolarité et de vie et l’accroissement du temps de loisir, elle varie notamment en fonction des niveaux d'exposition, divers et sélectifs, des différents publics, qui apparaissent très inégalement intéressés par la "culture", en particulier en milieux populaires et, plus généralement, parmi les personnes les plus démunies en capital culturel hérité (diplômes des parents) et/ou acquis (niveau de diplôme de l’individu). Partant de l’hypothèse générale qu’à l’instar du rapport cultivé à l’art et à la culture, les échanges matériels et discursifs autour des pratiques culturelles relèvent et révèlent des compétences qui ne se distribuent pas socialement au hasard, et dans le prolongement d’une analyse sur les effets des réseaux de sociabilité et du genre sur les pratiques culturelles menée dans le cadre d’un rapport pour le Département des Etudes et de la Prospective du Ministère de la Culture, on a cherché à questionner d’une part, la distribution sociale des sociabilités culturelles, i.e. les effets des variables sociologiques lourdes (genre, âge, position et origine sociale, niveau de diplôme, taille de la commune de résidence) sur les pratiques culturelles des "sociables" ; d’autre part, le poids des jeux croisés de prescription et d’influence culturelles au sein des couples et des groupes de pairs (amicaux et professionnels) ; enfin, les effets exercés par la mobilité sociale sur les rapports à la culture des populations les plus socialement éloignées des pratiques légitimes. Il s’agit ainsi d’appréhender l’importance des réseaux de sociabilité sur les conditions de formation et d'évolution des goûts et des pratiques culturels des agents issus de milieux populaires. L’objectif est d’analyser ces marchés d’influences culturelles au sein des groupes sociaux culturellement dominés, i.e. de saisir les effets, pour ces agents, de l'insertion passée et actuelle, plus ou moins intense et variable au cours du cycle de vie, dans divers groupes d’appartenance, dont l'influence prescriptrice, incitant à telle pratique culturelle ou stigmatisant telle autre, peut être simultanée et/ou successive, et éventuellement contradictoire diachroniquement et/ou synchroniquement. La présente analyse se fonde sur deux types d’approches : quantitative d’une part, grâce à l'exploitation statistique secondaire inédite des données des enquêtes Pratiques culturelles des Français de 1997 ; qualitative d’autre part, grâce à une série d’entretiens semi-directifs approfondis, en vue d’étayer, d’éclairer et de préciser les données statistiques.