5 juillet 2024
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Elisa Gavard, « Le rôle de la prédiction sémantique et syntaxique et de l’apprentissage statistique dans la lecture normale et dans la dyslexie développementale. », HAL SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), ID : 10.1027/1618-3169/a000568
L’idée du cerveau prédictif est devenue un concept clé en neuroscience et en science cognitives. Selon cette idée, le cerveau serait une « machine » à faire des prédictions sur les événements futurs et chercherait à minimiser les erreurs de ces prédictions, ce qui est la base d'un apprentissage implicite et adaptatif. Si la prédiction intervient dans de nombreux domaines cognitifs différents, les chercheurs qui étudient le langage ont été particulièrement actifs dans l'exploration du rôle de la prédiction dans la lecture. En effet, la lecture ne se limite pas à l'interprétation immédiate des mots, mais implique également une anticipation active de ce qui pourrait suivre, basée sur le contexte linguistique et les régularités statistiques. À ce jour, un nombre croissant d'études ont également tenté de déterminer si les compétences en apprentissage statistique ou AS (capacité à extraire des régularités statistiques pour faire des prédictions et former des attentes) pouvaient expliquer les différences interindividuelles dans les capacités de lecture au sein de la population générale (avec et sans troubles de la lecture). Dans le domaine de la dyslexie, il a été montré que les dyslexiques adultes utilisent davantage les informations linguistiques de haut niveau (sémantique, morphologie, syntaxe) pour « compenser » leurs déficits dans le traitement orthographique et phonologique, ce qui reviendrait à une forme de prédiction.Cependant, même si plusieurs aspects des processus de prédiction dans le langage ont été exploré, il existe encore quelques lacunes dans notre compréhension, ce qui nécessite des recherches supplémentaires. En effet la plupart des études ont porté sur des niveaux assez généraux de compétence en lecture plutôt que sur des processus plus dynamiques consistant à faire des prédictions linguistiques. De plus, si les études sur l’AS exploitent effectivement les mécanismes d'apprentissage du monde réel, on devrait s'attendre à des relations fiables entre l’AS et la lecture. Pourtant, il existe un réel débat dans la littérature concernant le lien entre compétence en lecture et AS ou encore la présence d’un déficit ou non d’AS dans la dyslexie. Ce conflit dans la littérature pose un défi fondamental pour notre compréhension du rôle de l’AS dans le langage et, plus généralement, dans la cognition.Dans cette thèse, nous aborderons les questions suivantes : Quel est le rôle de la prédiction sémantique et syntaxique dans la lecture à voix haute ? Les bons lecteurs, ainsi que les bons « compreneurs », sont-ils de bons prédicteurs linguistiques ? Et si les prédictions linguistiques reposent bien sur une capacité plus « domain-general » d’AS, les bons prédicteurs sont-ils également de bons « statistical learners » ? Enfin, ce potentiel lien entre prédiction linguistiques et non linguistiques joue-t-il un rôle dans la dyslexie développementale et quels sont les bases neurales de ces différents types de prédictions ? Cette thèse fait un lien avec trois domaines de la psychologie cognitive : la psycholinguistique de la lecture, les modèles de prédiction et l'apprentissage statistique. Enfin, nous apporterons des nouvelles connaissances théoriques à ce sujet en évaluant les effets de prédiction chez les adultes dyslexiques, mais également en précisant la nature de ces informations, la localisation précise des réseaux neuronaux impliqués dans la prédiction, et la dissociation entre les processus sémantiques et syntaxiques.