13 septembre 2024
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Patrimoines au présent
Directory of Open Access Books, ID : 10670/1.1tn1k1
La muraille élevée au xixe siècle. Elle formait la limite et la frontière de la ville, et a contribué à façonner la forme urbaine autant que les représentations symboliques de la cité. Sa « déprise » en tant qu'édifice militaire a favorisé l'installation d'usages détournés qui se sont généralisés sur sa partie terrestre avec les phases d'expansion rapides des années 1950 et 1970. La muraille terrestre accueille ainsi de l'habitat aménagé dans les murs et les tours, ainsi que des activités économiques légales, informelles, et illégales autour de l'agriculture, de l'artisanat, du commerce, de la récupération, des trafics illicites et de la prostitution. Elle est aussi le lieu d'usages quotidiens très variés : franchissements piétons pour rejoindre les arrêts de bus sur la rocade qui longe l'édifice sur les sept kilomètres de sa longueur, déambulations, repos et siestes, libations, préparations de repas, réunions autour d'un mangal (petit barbecue de métal), pratiques sexuelles, et, parfois, refuge de manifestants. En 1985, l'inscription de la ville sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco amène des opérations d'expulsion et de rénovation du site. Mais les usages détournés reviennent sitôt les chantiers achevé, ce qui détermine un processus de recomposition territoriale permanent et instable. Le dossier analyse les investissements concurrents du site et les conflits d'appropriation matérielle et symbolique (mise en scène historique, survie économique, lieu de défoulement...), qui restent reliés au processus d'urbanisation global de la métropole. Celui-ci s'appuie sur une première recherche sur ce terrain, menée à Istanbul en 2000 et 2001. Motivé au départ par une interrogation sociologique et anthropologique sur l'espace, il se termine par la proposition de définition de la notion de « lieux indécis. »