A plaisir. Sémiotique et scepticisme chez Montaigne

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2002

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Marie-Luce Demonet, « A plaisir. Sémiotique et scepticisme chez Montaigne », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.1tplpj


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Tous les objets du monde, naturels ou artificiels, sont susceptibles de recevoir une interprétation sémiotique « à plaisir ». Montaigne laisse dans ses écrits les indices d'une sémiotique sceptique confirmée par l'examen de la tradition scolaire et académique qui répartissait les signes entre « certains » et « probables ». Les premiers sont soumis à l'examen critique, et les langues elles-mêmes, constituées par imposition et par convention, perdent leur origine mythique (le mythe de Babel devient allégorique) et subissent, en tant que traces brouillées de notre nature divine, l'épreuve du doute. Toute reconstitution de cette origine relève d'une construction de l'esprit qui examine les vérités « possibles » et conduit à reconnaître la primauté du sensible dans l'émergence naturelle du langage à partir de gestes et de cris. En revanche, les signes de soi (symptômes ou marques) se rattachent à une philosophie « naturelle » qui s'exerce dans le fonctionnement logique de certaines métaphores, dans la proposition hypothétique, les anaphores ou dans l'usage subtil de la polysémie. De même, le nexus, lien nécessaire entre le signe et sa signification en fonction d'une intention, peut être complètement assumé par le sujet Montaigne. Ce naturalisme s'étend aux modèles et aux utopies littéraires qui sont à l'horizon des Essais (histoire-chronique, poésie primitive et poésie tout court), et aux formes linguistiques présentant une adéquation maximale à l'intention : phrase « déliée » de la conversation, langue rustique des montagnards, enthymème pratiqué sans le savoir. En même temps, l'« opinion » sceptique absorbe la volupté épicurienne tout en secrétant une méthode et une relation distanciée à la vérité. Le mouvement de la balance qui figure sur le jeton, mouvement de pesée et équilibre provisoire, permet de suspendre la décision en reconnaissant l'utilité des arguments sceptiques. La narration philosophique des Essais montre comment les choix de Montaigne sont revendiqués comme « téméraires », sur le plan théologique ou politique et jusqu'au jugement esthétique. Dans la décision de goût, l'éclair du ravissement voluptueux, loin d'annuler les précautions sceptiques, rejoint l'intime conviction du juge ayant résigné son office. À l'époque où la monnaie devient fiduciaire comme le langage, la décision téméraire selon Montaigne obéit à une coutume personnelle qui se confond avec l'instinct.

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