Le pape, l’enquête et la coutume : sur un voyage de Vézelay à Rome en 1151

Résumé En Fr

The narrative and the acts of a lawsuit between an abbey and its bishop during the 12th century can be found in the history of the Burgundian abbey of Vézelay. It also contains a record of the oral statements of both parties’ witnesses at the court of Pope Eugene in 1151. The document is studied in three different ways : 1) the technique of the investigation (still very uncertain in this mid 12th century), 2) the adversaries’ recognition of the pontifical jurisdiction (which was not recognized at the beginning of the conflict since the investigation seemed to be not only a tool for the search of truth but also that of the institution of the legitimate judge), 3) juridical qualification of the subject of the conflict (possession, developing into custom). We aim at showing how the ecclesiastic lawsuit, thanks to this very well documented case, offers an archetype of the modalities of formalisation of the conflicts which will be, a century later, those of the French royal jurisdiction.

La chronique de l’abbaye bourguignonne de Vézelay contient le récit et les actes d’un procès qui opposa l’abbaye à son évêque tout au long du XIIe siècle. Elle a conservé un procès-verbal d’audition des témoins des deux parties à la cour du pape Eugène III en 1151. Le document est étudié du triple point de vue : 1°) de la technique de l’enquête, encore fort hésitante en ce milieu du XIIe siècle ; 2°) de la reconnaissance par les adversaires de la juridiction pontificale, qui n’était pas acquise au début du litige, l’enquête apparaissant ici non seulement comme l’instrument de la recherche de la vérité mais aussi celui de l’institution du juge légitime ; 3°) de la qualification juridique de l’objet du conflit, la possession, évoluant vers la coutume. Nous entreprenons de montrer en quoi le procès ecclésiastique, examiné à partir de ce cas exceptionnellement bien éclairé par la documentation, fournit un archétype des modes de formalisation des litiges qui seront un siècle plus tard ceux de la juridiction royale française.