Les conditions d’efficience d’une ressource communicationnelle : la discipline de parole

Fiche du document

Date

2016

Périmètre
Langue
Identifiants
Collection

Archives ouvertes

Licence

info:eu-repo/semantics/OpenAccess




Citer ce document

Nicolas Kaciaf, « Les conditions d’efficience d’une ressource communicationnelle : la discipline de parole », HAL-SHS : sciences de l'information, de la communication et des bibliothèques, ID : 10670/1.2dknbr


Métriques


Partage / Export

Résumé Fr

Cet article entend montrer que l’avantage stratégique des acteurs dominants en termes de contrôle de l’agenda et des cadrages médiatiques tient en partie à leur capacité à maintenir une stricte discipline de parole dans leurs espaces d’action respectifs. Cette notion est ici appréhendée comme le résultat de l’ensemble des dispositifs, formels ou informels, mis en œuvre par un état-major organisationnel pour monopoliser la production et la diffusion publique de messages et d’images relatifs à l’organisation et à son champ d’activité. Cette perspective invite à rappeler, d’une part, que les groupes et leurs leaders ne rivalisent pas seulement pour capter l’attention des journalistes, promouvoir leurs visions du monde et imposer des représentations enchantées d’eux-mêmes et de leurs activités. Ils s’efforcent aussi de délimiter les frontières du visible et du caché, se protéger contre les intrusions journalistiques et empêcher la divulgation d’informations, sinon compromettantes, du moins susceptibles de contredire les messages officiels et d’activer des cadrages médiatiques distanciés ou critiques. Cette approche implique, d’autre part, de ne pas seulement se focaliser sur les luttes symboliques entre fractions objectivées de l’univers social, mais bien de prendre en compte ce qui passe à l’intérieur de ces espaces organisés qui fournissent aux journalistes les sources et protagonistes de l’actualité. Au-delà des pratiques d’enrôlement, d’évitement et de contournement des médias d’information, la gestion de la publicité médiatique suppose également de masquer les dissensions internes et contraindre les subordonnés à se taire, relayer les points de vue officiels ou recourir à des modalités de prises de parole (« fuites », confidences anonymes) qui, par leur informalité et leur caractère officieux, ne favorisent pas un accès « routinier » à l’espace médiatique. Il faut alors tenir compte de la double face du pouvoir des acteurs dominants sur la production de l’information : celui-ci se matérialise non seulement dans la capacité à « faire dire » aux journalistes ce qu’ils souhaitent mais aussi dans la capacité à inhiber la publicisation d’informations ou de déclarations potentiellement dommageables à leurs yeux. En interrogeant l’impact de la discipline de parole sur les productions journalistiques, nous souhaitons ainsi rappeler que les cadrages médiatiques sont avant tout redevables de ce que les rédacteurs peuvent voir, entendre et légitimement incorporer dans leurs récits de l’actualité. De la sorte, il s’agit de proposer une sociologie de la mise en visibilité médiatique qui articule sociologie compréhensive du travail journalistique et sociologie politique des secteurs dont les rédactions sont amenées à couvrir les activités. C’est un tel modèle d’analyse que nous allons chercher à exposer et soumettre à la critique, en lui octroyant le statut d’hypothèse de travail. Pour l’éprouver, il faut, dans un premier temps, identifier les logiques organisationnelles qui favorisent, structurellement ou conjoncturellement, le respect de la discipline de parole dans un secteur ou un groupe donné. Il s’agit ensuite de comprendre dans quelle mesure la possibilité offerte aux états-majors de faire taire l’énonciation publique de discours dissidents pèse sur l’activité des journalistes et notamment leur capacité à satisfaire certaines règles de distanciation. Pour autant, et afin d’échapper aux écueils d’une approche déterministe qui considèrerait que les journalistes ne disposeraient d’aucune initiative dans la production rédactionnelle, nous interrogerons enfin les conditions et les circonstances qui peuvent conduire aujourd’hui les entreprises médiatiques et leurs rédacteurs à rechercher et promouvoir des informations non officielles et potentiellement dommageables pour les titulaires de positions de pouvoir.

document thumbnail

Par les mêmes auteurs

Sur les mêmes sujets

Sur les mêmes disciplines

Exporter en