1973. Une année dans la vie du Christ à Hollywood

Résumé Fr

Introduction : Les films sur Jésus constituent une catégorie à part, et peut-être même un genre en soi. Il suffit de s'interroger sur l'image de Jésus qui vient à l'esprit : pour quiconque est né après la seconde guerre mondiale, elle est en partie conditionnée par les films sur Jésus. Ces films sont une des principales matrices des représentations du Christ dans la psyché collective. Ma propre représentation du Christ est ainsi nourrie de la mini-série Jésus de Nazareth de Franco Zeffirelli, programmée régulièrement jusque dans les années 80 à la télévision française, mais aussi de L'Évangile selon saint Matthieu de Pier Paolo Pasolini, projeté par un curé cinéphile lors d'une retraite de communion, et enfin de Jesus-Christ Superstar. De ce dernier, je n'ai gardé que des souvenirs vagues, associant le titre à une image que je n'ai identifiée comme étant celle de la couverture du Time magazine que bien plus tard. Ces films appartiennent à une mémoire collective et très moderne du Christ. Ils ne sont pas cohérents dans l'image du Christ qu'ils proposent, appartenant à plusieurs traditions sur lesquelles je reviendrai plus tard, mais tous ont largement contribué à construire mon imaginaire christologique. Mon cas particulier ne visait ici qu'à illustrer l'intérêt de l'analyse des films sur Jésus quelle que soit leur qualité cinématographique. En effet, pour saisir cette image de Jésus, il ne faut négliger aucun film. Sans doute là réside la force de l'historien : il se doit de prendre en compte chaque film, pas seulement les plus aboutis, ou les plus ajustés à leur sujet. La critique cinéphile française, particulièrement incarnée pour notre sujet par André Bazin et Amédée Ayfre, repris par leurs héritiers Guy Bedouelle ou Henri Agel, a longtemps été méfiante à l'égard des vies de Jésus sur grand écran. Il fallait privilégier une approche indirecte, celle des films aux figures christiques plutôt que celle des films sur Jésus, moins trompeuse selon eux. Cette fibre iconoclaste mériterait d'être interrogée et explorée. En tout cas, elle ne peut être retenue par l'historien dans sa quête du Jésus cinématographique, à moins de ne faire une simple histoire-esthétique : autant laisser cela aux critiques de cinéma, bien plus compétents. Une telle approche ne permettrait pas de prendre en compte l'année 1973. En effet, 1973 demeurera un cru détonnant dans la longue filmographie des « vies de Jésus », puisque trois films musicaux sont consacrés à la vie du Galiléen : Jesus-Christ, superstar, Godspell et, moins célèbre, The Gospel road. Ces trois films, surtout Superstar (sans doute plus en raison de son titre que de son contenu), sont devenus un des emblèmes du Jesus movement. Comment expliquer ce « Jesus musical » ? Quelles sont ses significations ? Ces films peuvent-ils être tenus pour emblématiques du rapport d'une époque à Jésus ? Quel rôle ont-ils joué dans le développement d'un Christ cinématographique ?

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