2008
Cairn
Arnaud Sauli et al., « Propos sur le Camp : les “tribus criminelles” : Inde (1871- ) », Multitudes, ID : 10670/1.2w7j77
L’ancrage du camp dans l’épistémique moderne se trouve dans une certaine nécessité et difficulté qu’ont rencontrée les métropoles européennes à partir du XIXe siècle à gérer des populations qu’elles conçoivent comme un surplus inutile et potentiellement dangereux. Faire une place à l’inutile allait poser inévitablement le problème conjoint de l’élimination ou de la mise à l’écart radicale qui parcourra également tout le XXe siècle. C’est en ces termes que vont notamment se formuler les difficultés rencontrées par le colonisateur britannique en Inde dans l’appréhension de certaines castes et tribus nomades perçues comme criminelles mais, surtout, à l’aune du système social des castes, comme criminelles de naissance et en cela irréformables. Le dispositif réflexif mis en place aboutit alors à une synthèse originale entre le système autochtone et la criminologie métropolitaine, en instituant une nouvelle catégorie de délits et de criminels : la criminalité de naissance. La criminalité de naissance allait ainsi trouver sa forme répressive dans la création d’une loi concernant les « tribus criminelles », et l’instauration de Settlements, véritables camps où des générations de groupes ainsi qualifiées allaient se perpétuer.