3 juin 2020
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Amélie Carrère, « Prise en charge de la dépendance des personnes âgées : une analyse des déterminants de l’institutionnalisation ou du maintien à domicile. », HAL-SHS : économie et finance, ID : 10670/1.2ysuw6
Sous l’effet du vieillissement de la population et des dynamiques sociales et sanitaires, les besoins de prise en charge des personnes âgées en perte d’autonomie progressent, se complexifient et se diversifient. Ces évolutions invitent à s’interroger sur les réponses apportées à la fois par la sphère privée et par la sphère publique. Les politiques publiques nationales privilégient le maintien à domicile, avec le développement de services d’aide. Les mesures prises font se détourner de l’offre en établissement, mais font aussi, implicitement, reposer une partie de la prise en charge sur l’entourage en complément d’une aide formelle plus ou moins accessible. De plus, depuis 2004, les départements sont les chefs de file de la politique gérontologique, avec des moyens et ressources disparates. Ce contexte soulève des questions ayant trait à l’équité sociale et territoriale de la prise en charge des besoins des personnes âgées. Cette thèse se propose d’étudier les choix de prise en charge de la perte d’autonomie en distinguant ce qui relève des déterminants de la demande (besoins et ressources) et ce qui relève de l’offre privée ou publique dans deux lieux de prise en charge : à domicile et en établissements. Les quatre chapitres de cette thèse analysent la situation française en utilisant des approches empiriques. Ils reposent sur un modèle de décision non-coopérative pour identifier les contraintes économiques, d’offre et de besoins influençant les choix des personnes âgées. La démarche consiste à mobiliser des méthodes économétriques et des données administratives ou d’enquêtes françaises : recensement de la population (2006-2015), Handicap-Santé (2008-2009), VQS 2015, CARE (2015-2016), EHPA (2007, 2011 et 2015) et SHARE (vagues 1 à 6). Pour identifier les déterminants du recours à l’institution, trois approches sont déclinées utilisant : les variations dans le temps, les variations territoriales et la variété des modalités de prise en charge à domicile. Le premier chapitre fait un état des lieux des besoins et de l'offre de prise en charge de la dépendance en France. Le deuxième chapitre s’appuie sur l'évolution de la résidence en institution des personnes âgées et analyse ce qui, dans cette évolution, relève de la modification des besoins et ce qui relève d'un changement structurel de la prise en charge. Le troisième chapitre confronte les variations départementales en matière de besoins d’assistance et d’offre de prise en charge ; il analyse dans quelle mesure la décentralisation de la politique gérontologique contribue aux différences de prise en charge. Le quatrième chapitre ajoute à la dichotomie domicile-établissement d’autres modalités de prise en charge à domicile. Il propose une valorisation de l’aide informelle pour identifier le rôle des contraintes financières sur l’arbitrage entre aide formelle et/ou aide informelle. Ces analyses montrent que la politique de maintien à domicile et la décentralisation de la politique gérontologique vont de paire avec des inégalités de prise en charge significatives. L’institution se resserre sur les besoins complexes, non gérables à domicile ; elle se resserre aussi sur des situations de dépendance plus simples, plus rentables pour les établissements dont les places sont limitées et les financements conditionnés. Du fait de freins financiers, on observe des inégalités dans le recours à l’entourage pour la prise en charge des besoins. Dans ce contexte, la décentralisation de la politique gérontologique, qui induit des variations dans les « restes à charge », exacerbe les différences socioéconomiques dans les modes de prise en charge.