Théorisations d’un populisme révolutionnaire : le peuple face à ses magistrats, entre sommeil et veille (1789-1793)

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Dès le début de la Révolution française, le choix de la représentation plutôt que de l’exercice direct du pouvoir par le peuple a été largement partagé, que ce soit par les amis de Sieyès ou par les épigones de Rousseau. Mais cette représentation a été pensée comme compatible avec la souveraineté du peuple, dans le cadre de ce qu’on a alors pu appeler une démocratie représentative. Celle-ci, dont les modalités ont été largement oubliées aujourd’hui, exigeait une surveillance par le peuple, selon des mécanismes relevant d’une sorte de populisme institutionnalisé. L’exigence d’un contrôle des gouvernants par les gouvernés passait notamment par une attention au public des tribunes à l’Assemblée, et la publication des débats dans les journaux. Cette surveillance pouvait déboucher sur divers mécanismes de censure populaire. L’article examine trois moments qui ont tenté de définir les formes de ce populisme : autour de l’installation de l’Assemblée nationale (l’accent est mis sur le rôle de Bentham) ; dans les débats sur le veto royal, et autour du projet de nouvelle Constitution en 1793 (au travers des réflexions de Condorcet notamment). Il interroge également le risque d’un populisme dévoyé par la confiscation de la voix populaire par certains porte-parole, et notamment Marat.

Right from the beginning of the revolutionary process, there was broad agreement on the choice of representation rather than the direct exercise of power by the people. Friends of Sieyès as well as epigones of Rousseau agreed on this point. But this representation was thought as compatible with the sovereignty of the people, as long as it was organized in the framework of the so-called representative democracy. The modalities of this democracy have been largely forgotten nowadays. This democratic regime was thought as requiring a close surveillance by the people, according to mechanisms of a kind of institutionalized populism. The deputies, judges and other magistrates had to be monitored by the public present in the tribunes of the assemblies, by the publications of journals etc. This surveillance could lead to a popular censorship – through various procedures. This article examines three key moments when the revolutionaries tried to define the forms of this populism: in 1789 when the National assembly was organized (the role of Bentham is underlined); in the debates regarding the royal veto, and in 1793 when the new constitution was discussed (here Condorcet’s projects are important). The article also deals with the risk of a distorted populism, should the popular voice be confiscated by a spokesman (Marat, for example).

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