2015
Nina Soleymani Majd, « L’épopée entre jeu et sérieux : la Geste de Guillaume d’Orange, la Digénide et le Shâhnâmeh », HAL-SHS : littérature, ID : 10670/1.378kq5
L’épopée présente d’innombrables éléments en rupture avec son sujet principal, avec la cohérence des "personae" qu’elle crée, ou bien encore avec sa tonalité d’ensemble. Ces éléments, à première vue insignifiants au regard du projet global de l’œuvre, et qui semblent être là pour le seul plaisir de l’auditeur, peuvent s’interpréter en termes de jeu. Nous aimerions montrer, après avoir examiné les différentes catégories de jeu présentes dans ces trois épopées médiévales d’aires géographiques très différentes, que ce jeu entre en dialectique étroite avec le sérieux de l’épopée. Nous nous appuierons pour cela sur l’exemple de la scène d’attaque à mains nues qui ressortit au motif du héros "fièrebrace". Celui-ci, pour diverses raisons que nous explorerons, rejette l’usage de l’épée ainsi que toutes les codifications d’un combat épique ordinaire tel qu’on en trouve à foison ailleurs dans ces trois épopées. L’exploitation ludique et comique de ce motif permet à l’auditeur de voir s’affronter les différents modèles politiques incarnés par les protagonistes de manière encore plus efficace, parce que détournée et concomitante d’un effet de "captatio beneuolentiae" par le jeu.