2009
Cairn
Isabelle Smadja, « Folie du moi et/ou folie du monde dans le théâtre contemporain », Psychologie Clinique, ID : 10670/1.3ad386...
Plus qu’aucun autre genre littéraire, le théâtre est directement concerné par le changement culturel qui, selon Foucault, témoigne de la forme monotone et triste de la maladie mentale face à la sauvagerie fascinante de la folie. Que seraient devenus Hamlet et Lear s’ils n’avaient pas été fous, mais malades mentaux, ainsi que Janet l’établit pour Raymond Roussel ? Le théâtre n’aurait-il pas perdu l’opportunité d’analyser sa propre nature, basée sur plus ou moins de prétexte au contrôle et sur la part d’aliénation de l’acteur en lui-même ? Si quelques dramaturges ont campé leurs personnages dans une maison de santé, ou soutenu les idées du mouvement de l’antipsychiatrie, le théâtre contemporain examine souvent les potentialités offertes par la nature humaine. Beaucoup de pièces retiennent l’une des fonctions que le drame shakesperien confère à la folie. Quelques œuvres portant témoignage de la complexité et dégageant les idées à propos du personnage du fou, rejettent le cercle vicieux qui veut que le comportement anormal signifie maladie mentale qui provoque l’internement. D’autres auteurs montrent la folie de la guerre mondiale, la torture, l’inhumanité de l’économie mondiale et établissent un lien entre la violence individuelle et la responsabilité collective. Pour Dürenmatt, Bernhard, Kane… la folie individuelle n’est qu’une vague copie de la folie qui affecte le monde.