Le criminel-né à la Une ? Lombroso et sa créature dans la presse française de faits divers (1909-1939)

Résumé Fr

Que Cesare Lombroso soit considéré comme l’un des pères fondateurs de la criminologie scientifique ou rejeté comme un cas malheureux de demi-savant, nul ne lui conteste le titre d’inventeur de la théorie du « criminel-né ». Récidiviste, fou moral par retour atavique à un âge primitif de l’humanité, porteur de tatouages et parlant volontiers l’argot, le « criminel-né » est aussi porteur de signes distinctifs au physique ayant valeur de stigmates indiciaires. Ces stigmates rapprochent l’apparence du criminel-né d’un homme préhistorique ou de certains « dégénérés ». La théorie de Lombroso a fait l’objet d’une diffusion paradoxale, à la fois très étendue et très critique. Si le criminel-né a fait long feu dans la communauté scientifique internationale, il importe d’explorer sa diffusion dans la culture européenne, et spécifiquement dans la représentation des « sales têtes ». Cette contribution propose une incursion dans la presse française de faits divers sur une période de trente ans, allant du décès de Lombroso (1909) à la veille de la Seconde guerre mondiale pour se demander si la créature a survécu à son inventeur. Cette période a valeur de test parce qu’elle n’est pas très explorée au point de vue de l’histoire de la criminologie. Il s’agit en France d’un moment de reflux assez net de la présence de Lombroso dans la culture scientifique. Le déclin de la théorie de Lombroso dans la communauté scientifique française se vérifie-t-il dans cette presse populaire de fait divers ? Peut-on établir une évolution convergente pour affirmer que Lombroso et sa créature ne passèrent pas, en France, la barrière chronologique du XXe siècle ?L'article part à la recherche de Lombroso et de son criminel-né dans un corpus de trois revues : L’œil de la Police, Détective et Police-Magazine. L’enquête a porté sur les occurrences textuelles et la recherche d’une présence visuelle limitée aux illustrations de couverture.