14 décembre 2023
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Rémy Duthille et al., « Des usages d'un passé anglais: les commémorations de la Glorieuse Révolution anglaise de 1688, de Thomas Paine à T. B. Macaulay (1792-1848) », HAL-SHS : histoire, ID : 10.5040/9781350190498
Dans la seconde partie des Droits de l’homme (1792), Thomas Paine appelle le Bill des droits anglais de 1689 “un bill des torts, et d’insultes”. Cependant, cette affirmation ne représente en rien une capitulation historiographique. Les réformateurs anglais, qu’ils soient whigs ou radicaux, n'acceptaient pas l'interprétation conservatrice d'Edmund Burke, qui représentait les événements de 1688-1689 comme une déviation minimale de la ligne hérédicale effectuée pour conserver les libertés ancestrales et pour lier la postérité à tout jamais, ils n'abandonnaient pas non plus les “principes de la Révolution” qui formaient le socle de la politique whig. Alors que la Révolution française éclipsait la Glorieuse Révolution dans les dîners et les pamphlets, on pouvait encore invoquer dans la presse les principes de 1688, que ce soit pour dénoncer le Congrès de Vienne, pour faire respecter des droits ancestraux au tribunal ou pour faire étalage de son patriotisme dans des réunions et des manifestations de rue réformatrices. Ce chapitre examine des moments où des groupes politiques rivaux se disputaient le contrôle de la mémoire de 1688. Ce fut le cas au milieu des années 1790, quand Charles Pigott et d'autres 'Jacobins' britanniques faisaient la satire des loyalistes qui se targuaient de la Glorieuse Révolution; puis de nouveu pendant les controverses autour du droit de vote des Catholiques. Il se produisit un glissement dans les célébrations du 4 novembre, le jour désigné pour célébrer l'anniversaire de Guillaume d'Orange servant après 1795 à célébrer l'acquittement de Thomas Hardy et d'autres membres de la Société de correspondance de Londres, la plus grande société radicale d'artisan de l'époque. Le souvenir de la résistance à Pitt venait se surimposer sur la Glorieuse Révolution. Sur le terrain historiographique, pendant que les chefs de file whigs montraient leur attachement inaltérable aux principes de 1789 en écrivant des histoires de la Révolution, les interprétations radicales de cet événement furent gommées par le succès de l’Histoire d'Angleterre de Thomas Babington Macaulay, dont les deux premiers volumes parurent en 1848, année de révolution en Europe continentale mais pas en Grande-Bretagne.