2005
Cairn
Patrick Weil, « Le statut des musulmans en Algérie coloniale : Une nationalité française dénaturée », Histoire de la justice, ID : 10670/1.3z5ju3
En 1803, le Code civil introduit une liaison entre nationalité et droits civils : le Français est celui qui jouit des droits civils. Lorsque en 1834, l’Algérie est officiellement annexée à la France, cette liaison est interrompue. Les indigènes musulmans ou juifs sont français. Mais ils ne jouissent ni des droits civils, ni des droits politiques : ils ont une nationalité de sujet, par défaut, fondée non pas sur l’attribution de droits mais sur le fait d’être placés sous la souveraineté directe de la France. Les juifs d’Algérie sont fait pleinement français par le décret Crémieux du 24 octobre 1870, les enfants de colons étrangers par la loi de 1889. Restent à l’écart les musulmans d’Algérie : formellement ils sont français, mais c’est une nationalité dénaturée : l’indigène musulman est soumis au « Code de l’indigénat », au régime pénal et de police, aux tribunaux répressifs indigènes. Entre 1865 et 1962, seuls un peu moins de 7000 musulmans deviennent pleinement français. Ce faible nombre ne s’explique que par le contrôle très strict des autorités administratives soucieuses d’éviter que dans le plus petit village les musulmans pleinement représentent une majorité de citoyens. Cette assignation à l’origine ethnico-religieuse ne prendra fin qu’en 1962 avec l’indépendance de l’Algérie.