10 juin 2024
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Daniel Borrillo, « Le minimalisme juridique ou comment ne pas trop gouverner », HAL SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), ID : 10670/1.42c86e...
On gouverne trop, en particulier en ce qui concerne la vie privée des individus. On gouverne mal, surtout lorsqu’il s’agit d’imposer un standard moral du rapport de l’individu à lui-même . Les relations sexuelles ne doivent pas être tarifées , les femmes, même de manière altruiste, ne doivent pas mettre au monde un enfant pour le compte d’un tiers (GPA) . Le clonage thérapeutique est interdit , le choix des donneurs de gamètes est prohibé tout comme l’insémination post-mortem. L’individu ne peut pas accéder à son information génétique (sans autorisation médicale ou judiciaire), l’euthanasie n’est pas une option pour le malade. L’individu ne doit pas vendre ses données personnelles. L’obligation de fidélité dans le mariage tout comme le devoir conjugal (c’est-à-dire, l’impératif d’entretenir des rapports sexuels avec son conjoint) constituent des contraintes de la vie familiale auxquelles on ne peut pas déroger de même qu’aux obligations alimentaires vis-à-vis de la belle-famille. Les transsexuels ne doivent pas avoir accès à la procréation médicalement assistée (PMA). Le détenu ne peut pas se suicider . Impossibilité également de se promener dans l’espace public habillé en burka, de conduire sans ceinture de sécurité ou de pratiquer le lancer de nain notamment. Même après la mort, l’individu ne peut pas disposer de son cadavre : l’embaumement, la cryogénisation, la promession , la terramation ou humusation et l’immersion en haute mer sont des modes de sépulture bannis en France. Interdiction aussi de conserver chez soi une urne funéraire. Impossibilité de disposer intégralement de son patrimoine après la mort (réserve héréditaire) etc., etc. Autant de situations dans lesquelles l’adulte ne peut pas consentir volontairement alors que non seulement il n’existe aucun préjudice à autrui, mais il peut de surcroit trouver un profit personnel. Au nom de quoi l'État fait usage de son pouvoir coercitif pour empêcher une personne à faire ce qui est dans son propre intérêt ? Pourquoi est-il a priori mieux placé que les individus eux-mêmes pour juger si une action relevant de la vie privée est conforme à leurs intérêts ?