2021
Cairn
Anne Simon, « La dystopie d'un monde sans peine », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, ID : 10670/1.47jcdb
Le droit pénal contemporain est révélateur d'un recul de la catégorie juridique des peines. Marginalisée au sein de la plus vaste catégorie des mesures restrictives et privatives de liberté, affaiblie dans sa définition autonome, la peine se présente dans une forme de désuétude. Elle pourrait même être en voie de disparition. Cette hypothèse doit être présentée comme une contre-utopie soutenue par des vents contraires : ceux portés par un courant sécuritaire d'abord qui, en s'écartant de la notion de peine par le recours à d'autres mesures contraignantes, souhaite s'affranchir librement des garanties qui l'accompagnent. Mais également les vents soufflés par les partisans d'une pénalité pensée exclusivement comme un outil individualisé de « traitement » et de « réinsertion ». Dans les deux cas, une volonté d'occulter la dimension rétributive de la peine peut être identifiée. Il semble pourtant indispensable de renouveler le cadre théorique applicable à cette dimension douloureuse de la peine vécue, car elle est la condition du maintien du régime protecteur de la peine dans notre ordre juridique.