2024
Isabelle Chesneau, « Lecture textométrique des rapports entre ville et culture en planification urbaine: Le cas de l’Île-de-France (1919-2019) », HAL-SHS : architecture, ID : 10670/1.4fznrc
L’analyse textométrique d’un corpus composé de cent ans de textes de planification de la région Ile-de-France, depuis la première Loi Cornudet de 1919 jusqu’au PADD du SCoT métropolitain de 2019, permet de saisir que de la place de la culture dans la planification urbaine est pensée à partir des rapports qu’elle entretient avec le monde du travail. Tout au long du siècle, ces deux forces sociales sont en dialectique, dessinant un axe sémantique « culture-travail ». Au cours des Trente Glorieuses, les notions de culture et de travail se placent aux deux pôles de cet axe, alors qu’avant et après, on observe au contraire des formes de syncrétismes, où les termes culturel-travail sont conjoints, pris dans une relation complémentaire. En fonction du caractère conjoint ou disjoint de la culture et du travail, les activités culturelles s’inscrivent diversement dans le temps et l’espace des villes. Ainsi, les expressions de la culture élitiste se cristallisent généralement au centre de l’agglomération, le lieu où cette « haute culture » se manifeste le plus intensément et où elle est produite : elle se présente comme le surplus des villes. Avec l’avènement de la civilisation des loisirs, pendant les Trente Glorieuses, ce lien entre milieu urbain et équipements culturels s’étend à tout type de situation urbaine qu’il s’agisse du centre ou de la périphérie. Les villes deviennent médiatrices culturelles, donnant accès à la culture et, en retour, celle-ci constitue le substrat des villes, qu’elles soient anciennes ou nouvelles. Depuis les années 2000, par un retournement du raisonnement tenu au début du XXe siècle, la culture n’est plus conçue comme le produit de l’urbain, sa valeur ajoutée, mais comme ce qui produit la ville, une force motrice commandant le développement territorial. La ville repose davantage sur une dynamique de forces créatives et labiles que sur les notions d’œuvres ou d’équipements culturels localisés et matérialisés.