Figures botaniques et agencements politiques chez Paradjanov

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2014

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Paradjanov Cinéma


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Jean-Michel Durafour, « Figures botaniques et agencements politiques chez Paradjanov », HAL-SHS : histoire de l'art, ID : 10.3917/rfhip.039.0089


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Résumé Fr

Il aura fallu d’étranges guingois d’images promptes, de girations d’appareils, d’angles culbutés, d’éclairs d’ampoule de studio et pluie d’arrosoir, de couleurs dégoulinées, d’étoffes raboteuses, de rais par des bords de pétales, de bric et de broc, animaux farceurs, sourires rotatoires, fifres suppliciés, maladresse taxidermée des acteurs, nœuds cicatriciels de bois, gruau de résine séchée sur un tronc, écailles d’écorce racornie, fagot de branches mal ficelé gênant la marche, corne de bélier ou de bouc prise dans la boue, fraises des bois poussées dans la bouche, enfants en angelots de crème et de gris de lin, petits corbeaux dans un panier, et surtout, à un moment unique, mousses et lichens notoirement mats, pour qu’un groupe d’individus, bûcherons, bergers, joueurs de trâmbiţa ou de guimbarde, colporteurs, buveurs d’eau-de-vie, bonnes vieilles d’un village goutzoul des Carpates (de quel siècle s’agit-il exactement ?), constitue, à la suite d’un meurtre, autour du destin tragique d’un seul, le fils du mort, mais aussi de quelques proches (frère, amante), une communauté réconciliée. Mousses, champignons crustacés sans doute, une poignée de plan les regroupant en un curieux tapis de temps mal bouturé, sont l’image la moins lisible de la communauté des hommes. On verra plus loin le cheminement qui y conduit. Mais pour l’heure : ne valent-elles pas, ces mousses, aussi pour métaphore, existence quasi minérale, vie à la fois balbutiante et adhérente, primitive et compliquée, de quelques hommes et femmes qui s’accrochent à une terre dure, de flysch, de molasses, à des alpages acrimonieux, des hivers coriaces, mais qui, comme les feuilles des bryophytes ne peuvent survivre que serrés les uns aux autres ? Et les lichens, du terne de la pierre, immobiles, pour métaphore d’une organisation humaine mimétique qui tient, en ces forêt raides, et pourtant tout aussi chaudes et lumineuses de l’été, ces rivières de baignade, de noyade, parce qu’elle s’est faite terre, et bois, et eau, c’est-à-dire discrète, fondue dans le décor ? Ne peut-on pas aussi y voir un bien insolite paradoxe chez un cinéaste si attaché aux traditions ethniques (selon les films : ukrainiennes, géorgiennes, arméniennes, turkmènes), et qui aura peut-être également acquis auprès de son père brocanteur quelque chose d’un goût pour ces collages de bric-à-brac et collections de Wunderkammer, que ce soit de tels organismes végétaux sans racine, sans lignine, c’est-à-dire sans lignage, qui aient précisément frappé comme ouvrant mon œil à la question politique peut-être la plus cruciale : « Comment vouloir la nécessité d’une communauté sur un territoire partagé ? » – dans ce récit qui fait, quant à lui, tant cas de la généalogie (la fille aimée de la famille haïe) ?

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