2022
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Mathilde Prévost, « De Khonsouemheb à Setné : Constantes et diversité dans les histoires de revenants entre le Nouvel Empire et l'époque gréco-romaine », HAL-SHS : histoire, ID : 10670/1.4sj9b9
Les relations entre les morts et les vivants sont perçues comme concrètes, constantes etréciproques : de même que les vivants jouent un rôle pour la survie des morts dans leur secondevie, les défunts peuvent agir auprès de ceux qu’ils ont laissé sur terre. La nature de ces échangesest marquée par l’ambivalence, chacun des deux partis pouvant opérer en faveur ou au détrimentde l’autre. Les vivants adressent donc des offrandes, ainsi que des prières orales ou écrites (cf.Lettres aux Morts) en espérant obtenir les bonnes grâces des trépassés. Ces derniers peuvent,quant à eux, non seulement influencer de façon bienveillante ou malveillante sur la vie des premiers, mais même se manifester auprès d’eux.Cette capacité est mentionnée dans plusieurs passages des textes funéraires. Les Lettres auxMorts attestent aussi de divers modes de manifestations perçus comme possibles, dans le cadred’un rite, comme l’a montré Sylvie Donnat, ou encore d’un rêve. Enfin, plusieurs contesdécrivent différents types de manifestations, dont celle sous forme de revenant, c’est-à-dire àtravers un retour direct du défunt sur terre de façon à se faire voir et à communiquer avec unvivant.Seuls deux textes de l’époque pharaonique ont été identifiés comme des histoires derevenants : le « conte de Khonsouemheb », daté de l’époque ramesside, et le très fragmentaire papyrus Chassinat II, publié par Georges Posener en 1960. Par ailleurs, quatre textes de lalittérature démotique du Ier millénaire av. J.-C. et de l’époque gréco-romaine peuvent êtrequalifiés comme tels, à savoir les papyrus « Setné I », CGC 30692, « Petese Tebtynis A » etCarlsberg 207.Cet article se donne deux objectifs. D’une part, il s’agit d’étudier, à partir du corpus ainsidéterminé, dans quelle mesure les histoires de revenants ont pu constituer un sous-genrehomogène au sein la littérature narrative égyptienne, avec des ressorts narratifs et des thèmesrécurrents. Pour ce faire, l’auteur cherche à dégager tout au long de cet article, et malgré l’étatfragmentaire et le petit nombre des documents disponibles, les constantes repérables entre lesrécits de revenants de même période (Nouvel Empire et Troisième Période intermédiaire d’uncôté ; époque gréco-romaine de l’autre).D’autre part, l’auteur souhaite examiner dans quelle mesure les histoires de revenants issuesde l’Égypte gréco-romaine ont hérité de la culture orale et écrite de l’époque pharaonique. Eneffet, ces textes ont régulièrement fait l’objet, et à juste titre, de rapprochements avec la culturehellénistique. Toutefois, plus récemment, plusieurs études ont développé l’idée que ces récits peuvent présenter une riche intertextualité puisée dans la culture égyptienne. La comparaisondes éléments remarquables des textes de ces deux périodes permettra peut-être d’approfondircette idée.Un premier temps cherchera à examiner la façon dont les revenants sont caractérisés sur un plan ontologique : quelle est, d’après ces textes, la nature de ces défunts ? Quels termes lesdésignent ? Quelles informations a-t-on sur leur apparence ?Dans un deuxième temps, l’auteur cherchera à caractériser les revenants sur un plan narratif,c’est-à-dire en tant que personnages littéraires et participants du schéma actanciel : quelle sontles origines, les motivations de ces revenants ? Enfin, une troisième partie observera les différentes étapes par lesquelles passentfréquemment ces récits de manifestation, de façon à repérer d’éventuels passages, sinon obligés,du moins récurrents.