Impacts organisationnels liés aux nouveaux médicaments. Rôle du pharmacien hospitalier

Résumé Fr En

L’accès à l’innovation thérapeutique constitue un enjeu majeur de santé publique. Il peut pourtant s’écouler plusieurs années entre la fin des essais cliniques et l’utilisation des médicaments dans le soin courant. En France, le dispositif des autorisations temporaires d’utilisation (ATU) a permis d’accélérer l’accès à de nouveaux médicaments, plusieurs mois voire plusieurs années avant leur autorisation de mise sur le marché (AMM). Pour autant, l’augmentation soutenue de la recherche clinique et l’essor des médicaments innovants nécessitent une nouvelle adaptation du système d’accès précoce à l’innovation. En cancérologie, les enjeux sont sous-tendus par les attentes des patients et de leur entourage, par la pression médiatique et par les enjeux de sécurité et de soutenabilité financière. La loi de financement de la Sécurité sociale 2019 permet désormais d’élargir les situations dans lesquelles un accès précoce à certains produits de santé peut désormais être autorisé et financé, avec la mise en place de deux nouveaux dispositifs : les ATU de cohorte d’extension (pour les extensions d’indication de médicaments disposant d’une AMM pour au moins une autre indication) et l’accès direct au post-ATU (pour les médicaments n’ayant pas bénéficié d’une ATU, disposant d’une AMM, mais en attente des accords de prise en charge financière). Le traitement des lymphomes T illustre la complexité du dispositif d’accès à l’innovation. Les essais cliniques constituent une option intéressante de traitement pour les patients. Au cours de ces dernières années, ils ont permis d’enrichir l’arsenal thérapeutique par des molécules innovantes comme la romidepsine en ATU nominative dans les situations de rechute ou de maladie réfractaire, le brentuximab vedotin dans le cadre d’une AMM pour le traitement des lymphomes anaplasiques à grandes cellules récidivants ou réfractaires et les lymphomes T cutanés en seconde ligne, le mogamulizumab et le vorinostat respectivement en ATU de cohorte et en ATU nominative pour le traitement des lymphomes T cutanés. Le rôle des pharmaciens hospitaliers en cancérologie est primordial pour accompagner l’accès précoce à l’innovation et pour la sécuriser à toutes les étapes du développement des médicaments, dès les essais cliniques. Ils assurent la préparation centralisée des chimiothérapies injectables et de l’immunothérapie selon des exigences d’assurance qualité garantes de la sécurité des patients. Plus récemment, le développement de la pharmacie clinique oncologique a démontré son intérêt dans l’optimisation de la thérapeutique des patients atteints de cancer, par une expertise pharmaceutique intégrée aux parcours de soins : analyse pharmaceutique de prescription, best possible medication history et medication reconciliation, prévention des effets indésirables, détection des drug-drug interactions, y compris avec l’automédication et la phytothérapie. D’autres programmes sont dédiés au suivi pluridisciplinaire ville-hôpital des patients ambulatoires traités par anticancéreux oraux. La littérature démontre que ces programmes centrés sur le patient réduisent la iatrogénie médicamenteuse pour un ratio coût-bénéfice favorable, incitant leur déploiement pour sécuriser l’accès à l’innovation thérapeutique.

Access to therapeutic innovation is a major public health issue. Several years can go by between the end of clinical trials and drug implementation in current care. In France, “temporary use authorization” speeds up access to new drugs some months or even years before market authorization. Even so, continuous growth in clinical research and a rising tide of innovative drugs require a new approach to early access to the produce of innovation. In oncology, the stakes are raised by the expectations of patients and families, media pressure and concerns of safety and financial sustainability. Since 2019, French health system funding legislation has broadened the scope of early access to certain health products, with two new provisions: “extension cohort temporary use authorization”, extending indications for drugs that already have market authorization for at least 1 other indication, and “direct access to post-temporary-use status”. Treatment of T-cell lymphoma illustrates the complexity of the system of access to innovations. Clinical trials are an interesting treatment option for patients and, in recent years, have enriched the therapeutic armamentarium with innovative molecules such as romidepsin, which has temporary use authorization for relapse or refractory disease, brentuximab vedotin, which has market authorization for recurrent or refractory anaplastic large cell lymphoma and cutaneous T-cell lymphoma in second-line, and mogamulizumab with “extension cohort temporary use authorization” and vorinostat with temporary use authorization for cutaneous T-cell lymphoma. The role of hospital pharmacists in oncology is primordial, to accompany early access to innovation and secure all the steps of drug development, from clinical trials onward. They centralize the preparation of injectable chemotherapies and immunotherapies with a quality assurance system that ensures patient safety. More recently, the development of oncology clinical pharmacy has contributed to optimizing cancer treatment by integrating pharmaceutic expertise into the care pathway: pharmaceutic analysis of prescriptions, Best Possible Medication History and medication reconciliation, prevention of adverse effects, and detection of drug-drug interactions, including self-medication and phytotherapy. Other programs ensure multidisciplinary community-hospital follow-up of outpatients receiving oral anticancer drugs. The literature shows that such patient-centered programs reduce drug iatrogenesis with a favorable cost/benefit ratio, encouraging deployment to secure access to therapeutic innovation.

document thumbnail

Par les mêmes auteurs

Sur les mêmes sujets

Exporter en