2018
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Marianne Blidon, « Tracer des frontières pour garantir l’ordre sexuel du monde », HAL-SHS : études de genres, ID : 10.4000/books.enseditions.8561
À partir de ces différents exemples – la médiatisation du cas de Cologne, la critique d’une lecture purement cartographique pour justifier des frontières entre civilisations et les effets politiques d’un dispositif spatial – c’est différentes dimensions de la frontière qui ont pu être explorées. Au delà de la dimension polysémique du terme et de l’élargissement de son usage au delà des seules limites étatiques, il me semble important de ne pas négliger les dimensions spatiales de la frontière envisagée sous l’angle d’un dispositif spatial qui implique à la fois une dimension matérielle, l’incorporation de normes sociales et des formes de subjectivation. Comme le rappelle notamment Henri Lefebvre (2000), l’espace est intrinsèquement politique, à toutes les échelles. Le genre et la sexualité permettent donc de penser la frontière à l’échelle la plus élémentaire du corps des individus jusque dans leur intimité. Partant du postulat que le personnel est politique, la sexualité produit des effets sur la notion de frontière. Inversement la frontière nous permet de penser les normes sexuelles et leurs effets sur les individus. La mise en œuvre des dispositifs pour garantir l’ordre sexuel du monde à différentes échelles repose sur une conception hiérarchisée et différenciée de l’autre et de l’altérité (Butler, 2005). La question des frontières doit nous interpeller dans son actualité non seulement à travers la crise des migrants qui en matérialise la traversée mais surtout à travers la rhétorique qu’elle suscite et la mise en place de politiques qu’elle autorise. À cette condition, la lutte des places à laquelle elle donne lieu pourra être rendue visible et dénoncée pour ce qu’elle est : un artefact. Mais un artefact qui impacte des vies et les rend plus ou moins vivables.