1988
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Alain Guillemin, « Nobles oisifs, bourgeois laborieux et rentiers honorables : loisirs et classes sociales dans Le gendre de Monsieur Poirier », Publications de l'École Française de Rome (documents), ID : 10670/1.53d859...
Pièce à succès d'Emile Augier et Jules Sandeau, créée le 8 avril 1854, au Théâtre du Gymnase dramatique, «Le gendre de Monsieur Poirier», met en scène les déboires d'un bourgeois parvenu qui a marié sa fille à un marquis. Prônant le compromis nécessaire entre aristocratie et bourgeoisie montante, au milieu du XIXe siècle, cette pièce ne présente cependant pas un miroir, même déformé, de la société française de l'époque : en d'autres termes, il ne faut pas raisonner dans l'optique de la théorie du reflet. Plus précisément, les personnages d'aristocrates et de bourgeois du gendre de Monsieur Poirier, ont certes des modèles dans la société contemporaine, mais la tradition théâtrale qui les façonne possède son autonomie et sa logique propre : ces figures nobles et bourgeoises, doivent autant aux personnages de Molière, de Lesage, d'Alainval ou de Sedaine, qu'à l'observation des mœurs par Jules Sandeau et Emile Augier. En ce sens, la tradition théâtrale exerce des effets objectifs sur la lutte symbolique qui oppose aristocratie et bourgeoisie, en imposant aux auteurs dramatiques, aux spectateurs et aux aristocrates eux-mêmes des stéréotypes tenaces. Confrontés à ces nobles et à ces bourgeois de théâtre, les «vrais» nobles et les «vrais» bourgeois doivent redéfinir à leur profit, ces images d'eux-mêmes que leur renvoie la scène française.