5 décembre 2024
Romane Vandroux et al., « Précarité, comportements alimentaires et santé : Analyse croisée en économie et psychologie sociale », HALSHS : archive ouverte en Sciences de l’Homme et de la Société, ID : 10670/1.550b87...
Cette présentation porte sur deux études distinctes explorant les relations entre précarité, insécurité alimentaire et comportements alimentaires. Ces travaux ont été présentés lors de la deuxième édition d’échanges entre chercheurs et acteurs publics, visant à montrer comment la recherche, et plus spécifiquement les sciences comportementales, peuvent éclairer les décideurs publics dans la mise en œuvre et le suivi de leurs politiques. Ces études ont également été discutées avec la Région Hauts-de-France afin de mieux comprendre les enjeux locaux et d’adapter les politiques publiques en conséquence.La première étude, fondée sur une analyse économétrique, utilise des données du questionnaire de l'INSEE mené en 2021 auprès de 4066 bénéficiaires des aides alimentaires. Elle met en évidence une relation causale entre l’insécurité alimentaire et la santé perçue, la présence de maladies chroniques et les limitations des activités quotidiennes dues à des problèmes de santé.La deuxième étude, ancrée en psychologie sociale, explore les hypothèses suivantes :-Hypothèse générale : La précarité influence les choix alimentaires en favorisant des comportements alimentaires malsains.-Hypothèse secondaire 1 : La précarité affecte la littéracie alimentaire, puis influence les choix alimentaires.-Hypothèse secondaire 2 : La précarité modifie les représentations sociales de l’alimentation, pouvant influencer les choix alimentaires.Les résultats de cette étude montrent que la précarité influe effectivement sur les choix alimentaires, favorisant des comportements alimentaires moins sains, tels que la recherche de commodité (rapidité et simplicité de préparation), d’accès (financier et physique) et de confort émotionnel (réduction du stress par la nourriture). En revanche, la précarité n’affecte pas directement la littéracie alimentaire, mais d’autres facteurs, comme la planification et la sélection des aliments, influencent les choix alimentaires. La littéracie alimentaire reste un facteur important, car elle permet de faire des choix plus sains, même en situation de précarité. Enfin, les résultats confirment que la précarité modifie les représentations sociales de l’alimentation : les individus en situation de précarité évaluent plus positivement, d’un point de vue de la valence, la mauvaise alimentation. Cette perception positive est associée à une plus grande tendance à faire des choix alimentaires influencés par le réconfort émotionnel apporté par la nourriture.Les résultats de cette étude ouvrent des pistes intéressantes pour comprendre comment la précarité influence les choix alimentaires à travers des mécanismes psychologiques et sociaux. Un axe de recherche majeur pour les études futures sera l’exploration de l’effet de la rareté (scarcity effect), qui décrit comment la perception de pénurie (temps, ressources) peut influencer les comportements de consommation. En situation de précarité, cet effet est amplifié par le stress et la charge cognitive, poussant les individus à faire des choix alimentaires immédiats et émotionnellement réconfortants, au détriment de choix plus réfléchis et sains.L’évaluation de cet effet dans les contextes de précarité alimentaire permettra de mieux comprendre l’impact du stress et de la charge cognitive sur les décisions alimentaires. Ces recherches futures viseront à développer des interventions plus efficaces pour améliorer les choix alimentaires dans les populations vulnérables et réduire les effets négatifs du stress et de la pression cognitive sur la santé publique.