2017
Cairn
Hélène Charton, « L’Homo africanus academicus : les limites de la fabrique d’une élite universitaire africaine en Afrique de l’Est », Outre-Mers, ID : 10670/1.5740d7...
L’éducation, et tout particulièrement l’éducation supérieure, est au cœur des politiques de modernisation de l’après-guerre qui émergent des crises sociales et politiques de la décennie précédente. Les modalités de formation d’une élite moderne éduquée, à travers la création d’universités coloniales, comme les universités Asquith dans les colonies britanniques, éclairent la nature et la portée des nouveaux liens forgés par la métropole avec ses colonies. Ces établissements visaient à faire émerger une élite occidentalisée et anglophile, fer de lance de la modernisation politique, sociale et économique des colonies, au cœur de la redéfinition du lien impérial non plus basé sur les distinctions raciales mais sur la différenciation sociale, incarnée par les élites africaines éduquées.Les étapes du développement de Makerere en Ouganda en université Asquith dévoilent les dimensions à la fois académiques, politiques et sociales du projet de création d’universités dans les colonies et permettent de définir les contours des nouvelles communautés académiques et le profil de l’Homo africanus academicus. Au Kenya, ces programmes de formation ont suscité de vives résistances de la part des autorités coloniales qui se sont efforcées de contourner et d’infléchir les directives métropolitaines pour tenter d’en limiter la portée sociale et politique et préserver un ordre colonial reposant sur une stricte différenciation raciale. Ils ont aussi été contestés par les étudiants africains, dont l’expression des revendications et des ambitions marquent les limites des programmes de formation métropolitains et redéfinissent le profil de l’Homo africanus academicus.