2016
Cairn
Kernec’H Yannick, « Lost ou le récit dans (presque) tous ses états », Télévision, ID : 10670/1.5c6o9h
L’œuvre de Damon Lindelof et de Carlton Cuse, les deux showrunners, condense en elle-même un grand ensemble de procédés narratifs, tels que la trinité flash-back, le flashforward, le flashsideway, l’écriture en centrics ou encore la narration transmédia. Dès lors, le jeu fragmentaire qui résulte de la confrontation et du redéploiement de ces procédés clés fait de Lost une véritable série test, une pure puissance de narration, une « finalité sans fin », pour détourner les termes de Kant, dans laquelle il ne s’agit plus seulement de comprendre de quoi on parle, mais comment. Cette superposition conduit à la nécessité, par tous les moyens, d’une perpétuation du récit pour lui-même, et non en vue de quelque révélation ou résolution d’une intrigue que l’on aura jamais pu identifier distinctement ; en cela, Lost est une série brisée, fracturée, et donc essentiellement déceptive.Ce faisant, on tente de dégager la possibilité d’une esthétique de la fracture de l’œuvre sérielle contemporaine à partir d’une confrontation entre une certaine conception de l’art et de la dimension narratologique.