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Antoine Moreau, « La forme culturelle du monde à l’ère de l’internet et du numérique », HAL SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), ID : 10670/1.5cebe4...
Nous aimerions proposer à la réflexion cette mise en perspective critique : dans quelle mesure le bouleversement opéré par le numérique et l’internet porte-t-il atteinte à la tradition culturelle d’un pays ? En quoi le support papier, qui fait le livre, est-il mis à mal par celui, numérique, qui fait le web ? Il y a-t-il destruction des objets issus de la culture savante dans leur transmission à tout un chacun à travers l’internet ?Si nous acceptons la mise en rapport dialectique entre tradition et transmission, la question qui se pose à nous sera alors : comment comprendre le passage au numérique autrement que par la destruction de ce qui fait tradition et culture ?Nous pourrions émettre cette hypothèse : au contraire de créer une rupture, la culture issue du numérique et de l’internet en serait la nécessaire mise à jour. Celle-ci paraissant d’autant plus contradictoire avec ce que nous reconnaissant comme « tradition » et « valeurs culturelles » qu’elle en est la radicale remise en forme. Il serait alors question d’art à l’intérieur du champ culturel : art de la forme, art de la forme de vie, art de vivre.Nous tenterons de montrer que le numérique permet un retour aux sources de ce qui peut faire véritablement tradition aujourd’hui. Nous pourrons expliquer comment le matériau numérique permet de retrouver, en révolutionnant les présupposés sociaux-culturels d’un pays, une tradition à nouveaux frais. Nous montrerons que les principes qui fondent l’existence de l’internet sont en phase avec la culture de « l’homme du commun à l’ouvrage » reconnue institutionnellement à la fin du XXe siècle et qui s’affirme généralisée au XXIe siècle.Une théorie pourrait être énoncée : dans un monde globalisé, la transmission qui transite à travers le « réseau des réseaux » fait retour à l’oralité. Le Texte (au sens de Barthes) se transmet immédiatement du producteur au consommateur, il va comme de « bouche à oreille ». Ce que nous appelons le « téléphone arabe » y trouve là son expression la plus juste.Question : la véritable fracture culturelle ne viendrait-elle pas de l’Occident lui-même ? Ne viendrait-elle pas d’un mode culturel qui peine à s’orienter avec justesse dans un monde façonné par une modernité devenue aujourd’hui problématique ? L’avènement du numérique, ne l’inviterait-il pas à reconsidérer ses valeurs en prenant en compte d’autres modalités culturelles ?Notre réponse interrogera la forme culturelle que prend le monde à l’ère de l’internet et du numérique. Nous émettrons l’idée que les traditions culturelles issues d’Orient (Proche, Moyen, Extrême) sont en phase avec l’internet, le numérique et la globalisation du monde. Il est question d’art de vivre le numérique plutôt que de pousser à bout des performances basées sur le calcul.Notre conclusion pourrait être celle-ci : un entrelacement d’hyper-modernité et de traditions proto-scripturaires forment aujourd’hui notre monde ordinaire. Le virtuel double, sans en nier la réalité et sans le dépasser, ce qui fait désormais notre réalité quotidienne. L’horizon de nos existences se situe, non seulement du côté du soleil levant, dont les technologies numériques sont à la pointe du progrès, mais également de l’Orient en son entier (comprenant les Pays du Maghreb), prenant ainsi le relai d’un Occident aujourd’hui accidenté.