L'entreprise est-elle une institution ? Le cas du Familistère de Guise

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J.B.A. Godin est l’un des rares employeurs du xixe siècle à s’être inspiré de C. Fourier pour organiser le travail et la vie de ses ouvriers. Le Familistère de Guise dont il est le fondateur est une expérience de longue durée qui a tout pour séduire. Ne voit-on pas là, enfin, une utopie en acte ? Opéré sur la période qui court jusqu’en 1888, le bilan est nuancé. Mais si le cas du Familistère mérite attention, c’est aussi parce qu’il cumule tous les atours d’une institution. Armé d’une définition d’inspiration durkheimienne de cette dernière notion, l’article décrit les différents processus qui participent du travail d’institution à l’œuvre au sein du Familistère. Il se propose ce faisant de contribuer au désenchantement du mythe de l’institution totale qui hante aujourd’hui certains débats de sociologie économique sur l’entreprise.

Under the influence of Fourier’s philosophy, the French manufacturer J.B.A. Godin set up a social community of workers in the middle of the XIXth Century. Within the “Familistère”, Godin managed a factory, accommodations for workers, a school, shops, a theater, aso. This paper describes this innovative experimentation that run until the death of Godin in 1888. The case of the “Familistère” is not only interesting per se. It is also a relevant way to sustain the debate on the status of the firm in the field of the current economic sociology. In such a perspective, the author uses a definition of the institution partially indebted to the durkheimian sociology. He suggests that, even in the case of paternalistic organizations like the “Familistère”, firm can never be regarded as a “total institution”.