19 mai 2023
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Cynthia Fedani et al., « Le cimetière carcéral de Loos (Métropole de Lille, 19e siècle) : traumatisme et infection chez deux jeunes détenus », HAL SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), ID : 10670/1.66cdf8...
Les fouilles menées sur le site du centre pénitentiaire de Loos (59), rue du Marais – avenue du Train par la société Eveha en 2021-2022, ont permis de mettre au jour un cimetière carcéral du 19e siècle. Il fut utilisé de 1824 à 1898 pour inhumer les détenus, adultes et mineurs, de la prison de Loos et des colonies pénitentiaires agricoles Saint-Bernard et Guermanez. Parmi les 50 individus immatures exhumés au cours de la fouille et en cours d’étude, nous présentons ici les premiersrésultats de deux cas pathologiques. Le premier individu, 4452, d’âge au décès estimé entre 18 et 23 ans et de sexe masculin, présente des atteintes sur plusieurs éléments du squelette : au niveau de la face antérieure du sacrum et de lafosse iliaque gauche, un important remodelage ostéopériosté est observé sous la forme de volumineuses empreintes arrondies, une destruction de la surface auriculaire gauche, une fine réaction périostée sur la surface antérieure des corps des vertèbres lombaires ainsi que des lésions vermiculées sur l’endocrâne (type SES). Nous discuterons, pour ce cas, l’hypothèse d’un volumineux abcès tuberculeux pelvien, qui, au vu de la topographie des atteintes osseuses, pourrait être d’origine viscérale digestive. Le deuxième individu, 4078, d’âge au décès estimé entre 19 et 20 ans et de sexe masculin, présente une importante malformation de l’articulation du coude droit visible dès le stade de la fouille : le capitulum de l’humérus est totalement dissocié de la trochlée et en réponse, la tête radiale est élargie, ainsi que l’olécrâne de l’ulna et l’incisure radiale. L’hypothèse d’une pseudarthrose du coude droit consécutive à une fracture articulaire non consolidée (Salter-Harris, type 4) sera discutée, ainsi que l’impact fonctionnel de cette séquelle post-traumatique sur la vie quotidienne de cet individu. Il présente, par ailleurs, des empreintes nucléaires (nodules de Schmorl) étagées pouvant être mises en relation avec le port de charges. De plus, cet individu montre de fines réactions périostées unilamellaires sur les os longs et quelques os du tarse. Cet aspect pourrait correspondre au syndrome connu sous le nom d’ostéoarthropathie hypertrophiante pneumique, souvent attribué dans la littérature paléopathologique à la tuberculose. Ces observations préliminaires peuvent témoigner de conditions de détention associant activités traumatisantes et promiscuité favorisant la transmission de maladies infectieuses.