24 septembre 2013
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Patrice Ballester, « Les platanes du Canal du Midi face au chancre coloré (fungus Ceratocystis fimbriata f. sp. platani) : gestion, protection et création d’un nouveau paysage », HAL-SHS : géographie, ID : 10670/1.67vf7r
Le Canal du Midi est un ouvrage d'art remarquable conçu par l'ingénieur Pierre-Paul Riquet au XVIIe siècle pour les marchands du Languedoc et la royauté. Il s'inscrit dans la mémoire collective des populations locales à travers une multitude de représentations positives allant du tourisme généré par cette voie bleue et verte avant l'heure du tourisme de masse et du dix-neuvième siècle, à la vision idéalisée d'un paysage de nature et de loisirs pour un large public. Pourtant, le platane, élément majeur de son paysage, connaît depuis une décennie la croissance d'un parasite et d'un champignon, le chancre coloré, au chancre coloré (fungus Ceratocystis fimbriata f. sp. platani); entraînant la disparition inéluctable des arbres le long du chemin entre la mer Méditerranée et Toulouse. Une mise en scène et en récit forgent une nouvelle histoire de ce paysage remarquable inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO en 1996 par la plantation de nouvelles espèces résistantes au champignon. Entre l'identification d'une identité paysagère recherchée par les touristes et la nécessaire revalorisation du site, le canal devient un sujet hautement controversé car ne prenant en compte ni les apparitions de l'ancien canal tout au long de son histoire ni les nouveaux objectifs des Voies navigables de France (WWF-VNF). A travers cette recherche et cette situation de crise environnementale, nous mettons en lumière trois points pour l'avenir. (1) Les platanes sont un marqueur fort de l'identité actuelle du canal tourné depuis les années 1960 vers le tourisme de masse. La disparition annoncée des platanes remet en cause l'économie touristique locale, dont l'une des ressources est la représentation du canal à travers les platanes. Les érudits locaux sont très anxieux et participent aux débats entre spécialistes par le biais des sociétés savantes pour alimenter les réflexions. (2) La gestion du canal s'est complexifiée comme l'a montré l'analyse géohistorique, du fait de la multiplication des acteurs et des enjeux économiques. Créer, justifier ou mémoriser un paysage n'est pas anodin. Avec un investissement et un mécénat national et mondial s'élevant à des centaines de millions d'euros, et ce sur plusieurs générations, force est de constater que les acteurs d'aujourd'hui semblent plus gênés que les acteurs d'hier, voulant à tout prix conserver leur/son/votre paysage pour le bien des citoyens et de l'économie touristique. (3) Le chancre coloré implique la planification à long terme d'un projet paysager courageux et ambitieux de VNF, véritable projet de développement intergénérationnel local et durable, mais nécessitant une adaptation aux nouveaux usages récréatifs. Elle doit tenir compte des efforts de communication et de marketing pour expliquer, dans les 20 prochaines années, la présence sur les berges d'un paysage ni fini ni bâti, mais en attente d'une nouvelle légitimité.