1 décembre 2020
Nicola Navone, « De « province endormie » à « périphérie cultivée ». L’architecture au Canton Tessin entre 1945 et 1970 », HAL-SHS : architecture, ID : 10670/1.6jv9mk
Il est généralement reconnu que les années cinquante signent les débuts de la diffusion de l’architecture moderne au Tessin, le canton suisse de langue italienne. Cette époque voit en effet de nombreux architectes tessinois adopter la Modernité comme patrimoine commun : une Modernité qui, dans ses différentes déclinaisons, dépasse alors ce caractère pionnier et épisodique qui avait dominé les années précédant la seconde guerre mondiale (la bibliothèque cantonale de Carlo et Rino Tami, à Lugano, louée par Giuseppe Pagano dans la revue « Costruzioni-Casabella », est évidemment une exception).Se révèle alors la fécondité potentielle de la situation des architectes tessinois, naturellement placés dans le giron de la culture italienne, mais largement débiteurs, en termes de formation, de la culture architecturale d’outre-alpes. Ainsi, de province culturellement timorée - en termes d’architecture - qu’elle était dans les années quarante, le canton Tessin s’achemine lentement pour acquérir le statut de « schöpferische Peripherie » ou pour le moins de « périphérie cultivée ».La mutation devient évidente dans la seconde moitié de la décennie, quand apparaissent les meilleurs œuvres de Rino Tami (1908-1994), Augusto Jäggli (1911-1999) et Alberto Camenzind (1914-2004), c’est-à-dire les anciens élèves d’Otto Rudolf Salvisberg à l’école polytechnique de Zurich, qui avaient débuté juste avant la guerre. Ce processus de « déprovincialisation » poursuivra dans les années soixante grâce à d’autres architectes plus jeunes, comme Franco Ponti (1921-1984), Peppo Brivio (1923) et Tita Carloni (1931-2012), suivis, peu après, par Luigi Snozzi (1932), Livio Vacchini (1933-2007), Aurelio Galfetti (1936), Mario Campi (1936-2011), Flora Ruchat-Roncati (1937-2012), Bruno Reichlin (1941), Fabio Reinhart (1942), Mario Botta (1943) : c’est-à-dire les principales personnalités de cette génération d’architectes internationalement reconnue suite à l’exposition « Tedenzen. Neuere Architektur im Tessin », organisée en automne 1975 à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Zurich.Bien qu’il soit plus que justifié de définir les années cinquante comme « années de fondation » de l’architecture « moderne » au Tessin, cette décennie, aussi bien que la suivante, reste un terrain d’enquête peu fréquenté. Ce projet de doctorat sur titres se propose de combler cette lacune historiographique et, en même temps, de mettre en évidence, par le biais de « cas d’études » exemplaires, les échanges et les interactions qui se déploient dans une région de frontière également exposée aux influences culturelles rayonnant de Milan et de Zurich. La qualité des œuvres et l’originalité des recherches des principaux protagonistes de cette saison contribuent à donner à cette étude une relevance qui va bien au-delà du simple intérêt régional ou national.