2014
Cairn
Johan Menichetti, « L'écriture de la constitution de l'An VIII : quelques réflexions sur l'échec d'un mécanisme révolutionnaire », Napoleonica. La Revue, ID : 10670/1.6kcyli
La Constitution de l’an VIII illustre les liens profonds unissant la Révolution française et le Consulat. Son élaboration s’est faite sur le modèle d’une mécanique institutionnelle : son principe d’action résidait dans la spécialisation des fonctions, tandis que le Sénat Conservateur était chargé d’en garantir le mouvement ordonné. Cette conception mécaniste de la Constitution s’est développée en tenant compte d’une mécanique plus vaste, définie par la science de l’organisation sociale. Convaincus que le droit public ne suffit pas pour assurer une direction raisonnée des sociétés politiques, les artisans de la Constitution de l’an VIII ont tenté d’établir des rapports étroits entre les pouvoirs constitués et les mécanismes dévoilés par les sciences sociales. De telles intentions expliquent la singularité d’une pensée juridique, commune à une partie des hommes de Brumaire, et qui fait de la règle de droit l’instrument d’un projet consistant à diriger sans contraindre.La réalisation de ces vues se heurte à la réalité politique, et n’est accomplie que très médiocrement par un texte constitutionnel dont la rédaction définitive conduit à une déformation de la pensée originelle de Sieyès. Mais l’art social continuera d’être employé au secours de cette mécanique compromise par les principaux brumairiens. Jusqu’à leur disgrâce, cette action témoigne de la survie d’un projet scientifique consubstantiel à la Révolution.