Offrons-leur l'asile ! : Critique d'une représentation des clochards en « naufragés »

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2005

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Paru en 2001 dans la collection Terre Humaine (Plon), le livre de l’anthropologue psychanalyste Patrick Declerck, Les Naufragés. Avec les clochards de Paris, rencontre vite un succès peu commun dans le domaine des sciences humaines, qui rappelle à certains La Misère du monde. Systématiquement cité dans l’univers académique, l’ouvrage est encensé dans les médias et reçoit un écho considérable dans le milieu des experts et des professionnels de l’exclusion. Mobilisant des observations et des entretiens menés au cours de 15 ans d’immersion dans le monde de « la cloche parisienne », le livre dépeint le clochard sous le versant d’une altérité absolue, lui attribue une « folie spécifique » – le « syndrome de désocialisation » – et en appelle à une prise en charge centrée sur une « fonction asilaire ». Pour des raisons engageant tant le savant que le politique, cette publication appelle un examen attentif. Elle prolonge et explicite en effet un ensemble de thèses très présentes parmi les responsables de « la lutte contre la grande exclusion » telle qu’elle est définie, depuis une dizaine d’années au moins, jusqu’au niveau gouvernemental. Le caractère éminemment discutable du mode – empirique et théorique – de production des thèses défendues dans Les Naufragés laisse dès lors apparaître le socle foncièrement essentialiste sur lequel reposent les thèses « néo-asilaires » aujourd’hui très prégnantes dans l’univers de « l’urgence sociale ».

When it came out in the Terre Humaine collection (Plon) in 2001, the book by the anthropologist and psychoanalyst Patrick Declerck, Les Naufragés, avec les clochards de Paris (The Shipwrecked, a recent study of the homeless of Paris), was quickly met with a success quite uncommon in the field of the human sciences, not unlike the success of Pierre Bourdieu’s La Misère du monde (The Weight of the World). Widely cited in the academic world, the work is acclaimed in the media and has a considerable following among the experts and professionals of social exclusion. Drawing on observations and interviews made over the course of a fifteen-year immersion in the world of the “ Parisian down-and-outs”, the book depicts the homeless in the guise of absolute otherness, attributing them a “specific form of madness” – the “desocialization syndrome” – and calls for setting up a specific care system largely based on the asylum model. For both scholarly and political reasons, this publication calls for attentive examination. It extends and clarifies a set of theses that are very prominent among those in charge of the “fight against radical exclusion”, as the notion has been defined for the last ten years at least, even in government circles. The questionable nature of the theses – both empirical and theoretical – defended in The Shipwrecked reveals the fundamentally essentialist underpinnings of the “neo-asylumnist” positions which, today, are widely diffused in the treatment of “social emergency”.

Zusammenfassung Das im Jahr 2001 in der Reihe Terre Humaine (Plon) erschienene Werk des Anthropologen und Psychoanalytikers Patrick Declerck Les naufragés. Avec les clochards de Paris („Die Schiffbrüchige. Mit den Pariser Pennern“) wurde schnell zu einem für die Sozialwissenschaften unüblichen Erfolg, der manche an Bourdieus Das Elend der Welt erinnerte. Vielzitiert im akademischen Bereich, begeistert von den Medien aufgenommen, stößt das Werk auch auf eine beträchtliche Resonanz unter den theoretischen und praktischen Experten für soziale Ausschlussmechanismen. Gestützt auf Beobachtungen und Interviews, die in über 15 Jahren des Eintauchens in die Welt der „Pariser Penner“ gewonnen wurden, zeichnet das Werk den Clochard in der Perspektive der totalen Alterität, und schreibt ihm einen „spezifischen Wahnsinn“ – das „Syndrom der Entsozialisierung“ – zu, das von einer „Anstalt“ aufgefangen werden sollte. Aus Gründen, die sowohl Wissenschaftler wie Politiker angehen, verdient diese Studie eine aufmerksame Untersuchung. Sie vertritt und vertieft in der Tat eine sehr geläufige These unter den Verantwortlichen für den Kampf gegen die soziale Exklusion, wie sie seit mindestens 10 Jahren bis in Regierungskreise hinein vertreten wird. Der auf empirischer wie theoretischer Ebene diskutable Charakter der in Les Naufragés entwickelten Thesen, lässt den grundsätzlich reduktionistischen Sockel der „Neo-Anstalts“-Thesen aufscheinen, die heute eine wichtige Rolle im Umgang mit dem „sozialen Notstand“ spielen.

Resumen El libro del antropólogo psicoanalista Patrick Declerck Les Naufragés. Avec les clochards de Paris, publicado en Francia en 2001 en la colección Terre Humaine (Plon), tuvo un vertiginoso éxito, algo tan poco común en el ámbito de las ciencias sociales que hay quienes lo asocian al de La miseria del mundo. Les Naufragés, obra sistemáticamente citada en el universo académico y elogiada por los medios de comunicación, encuentra un eco considerable entre los expertos y los profesionales de la exclusión. En este libro se recurre a observaciones y entrevistas realizadas durante quince años de inmersión en el mundo de «la mendicidad parisiense». También se establece una semblanza del clochard (mendigo) desde una perspectiva de alteridad absoluta; se le atribuye una «locura específica» –el «síndrome de desocialización »– y se apela a una estrategia de intervención centrada en una «función asilar». Por motivos que incumben tanto a los científicos como a los políticos, esta publicación requiere ser examinada detenidamente, ya que en ella se desarrolla y se explicita un conjunto de tesis muy presentes entre los responsables de «la lucha contra la gran exclusión», como se la define, desde hace por lo menos diez años, incluso en la órbita gubernamental. Por ende, el carácter altamente discutible del modo –empírico y teórico– de producción de las tesis defendidas en Les Naufragés pone de manifiesto su sustento, en el fondo esencialista. Sobre él se construyen las tesis «neoasilares», que hoy día tanto se imponen en el universo de la «urgencia social».

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