Les usages de l’altérité

Résumé Fr En

La frontière italo-française est un espace où s’effectue une sélection entre des voyageur·ses désiré·es et les « indésirables ». Fondant leurs contrôles sur une appréhension stéréotypée du « migrant », les forces de l’ordre participent au processus d’altérisation de la figure de l’exilé·e. Les exilé·es sont alors homogénéisé·es sous une catégorie qui les réduit à une « race », à une classe sociale et à une figure criminelle. Néanmoins, l’altérité imposée à la frontière n’est pas seulement le résultat d’une stigmatisation subie : elle représente aussi la source à partir de laquelle se déploie toute une agentivité migratoire permettant aux exilé·es de déplacer les frontières sociales et de franchir la frontière territoriale. Cet article vise donc à appréhender les tactiques migratoires de contre-altérisation, au prisme d’un terrain d’observation particulier : le « breakfast » du collectif Kesha Niya. Situé à quelques mètres des PAF (Police aux frontières) du côté italien, le breakfast est un lieu qui accueille les exilé·es à peine refoulé·es en Italie. Devenu escale incontournable dans le paysage local, il constitue un terrain d’observation particulièrement riche pour étudier les stratégies de reconfiguration des rapports sociaux d’altérité entre exilé·es et militant·es – reconfiguration qui ouvre la voie au passage des frontières.

The Italian-French border is a space where a selection is made between desired travellers and "undesirables". Basing their controls on a stereotypical perception of the "migrant", the police participate in the process of othering the figure of the exile. The exiles are then homogenised under a category that reduces them to a race, a social class and a criminal figure. Nevertheless, the otherness imposed at the border is not only the result of an undergone stigmatization: it also represents the source from which a whole migratory agency is deployed, allowing the exiles to displace social boundaries and to cross the territorial border. This article therefore aims to understand the migratory tactics of counter-othering, through the prism of a particular field of observation: the "breakfast" of the Kesha Niya collective. Located a few metres from the PAF (Border Police) on the Italian side, the breakfast is a place that welcomes the exiles who have just been sent back to Italy. It has become an essential stopover in the local landscape and is a particularly rich field of observation for studying the strategies of reconfiguration of social relations of otherness between exiles and activists - a reconfiguration that paves the way for border crossings.

document thumbnail

Par les mêmes auteurs

Sur les mêmes sujets

Sur les mêmes disciplines

Exporter en