Relectures de la décadence dans les Vies des douze Césars de Suétone

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L’image que l’on conserve aujourd’hui des premiers empereurs romains doit beaucoup aux biographies de Suétone qui, dans les Vies des douze Césars, n’hésite pas à montrer leurs travers les plus sordides. Les transgressions des souverains sont de tout ordre, de la prostitution d’Othon à la torture de mouches par Domitien, en passant par l’épilation, la croyance aux fantômes, l’ivrognerie, etc. Malgré l’étalage de ces travers, les biographies impériales sont pourtant l’une des principales sources historiographiques sur la période, et le texte a donc été traduit dès le début du XVIe siècle, puis retraduit à intervalles réguliers. De 1500 à 1800, six traducteurs se sont attelés à la difficile tâche de traduire ces Vies, et de faire passer en français les détails transgressifs qui y figurent. La comparaison de ces traductions permet de mettre en valeur la marge laissée au traducteur et le poids de son époque, certains soulignant tel vice tandis que d’autres le passent sous silence ou l’atténuent. Othon (II, 3) fait ainsi preuve, selon les siècles, de « luxure », de « paillardise » ou de « prostitution », quand il n’est pas considéré comme un « mignon », autant de variations lexicales qui ne sont pas seulement le signe de l’évolution de la langue. C’est bien le rapport des traducteurs (et de leurs lecteurs, ou tout au moins de leurs destinataires) à l’Antiquité qui est en jeu, et en particulier à ces détails parfois courants à l’époque de Suétone et qui constituent autant de transgressions dans la monarchie chrétienne de la Renaissance et des siècles suivants.

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