13 mai 2022
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Mark Corcoral, « Le droit comme outil diplomatique : le cas de l'offensive américaine contre Huawei », Archive ouverte de Sciences Po (SPIRE), ID : 10.3917/rai.085.0101
Depuis 2018, les États-Unis mènent une vaste initiative diplomatique visant à convaincre leurs partenaires et alliés d’exclure les équipements Huawei de leurs réseaux de télécommunications. Parallèlement, cette entreprise chinoise fait l’objet de poursuites pénales – dont l’une a conduit à l’arrestation de sa directrice financière – et de sanctions économiques – qui prennent pour cible ses chaînes d’approvisionnement. Examinant ce volet juridique de l’offensive américaine contre Huawei, l’objectif de cet article est de montrer comment les États-Unis utilisent leur droit à des fins de politique étrangère. Pour cela, nous procéderons en deux temps. D’abord, nous montrerons que l’engagement de poursuites pénales permet au gouvernement américain de tirer parti de l’aura symbolique du droit, dans le but de mettre en cause l’intégrité morale de la direction de Huawei. Ensuite, nous montrerons que le recours aux sanctions lui permet de tirer parti de la malléabilité du droit, afin de susciter des interrogations quant à la capacité du groupe à répondre à la demande de ses clients. Par conséquent, le droit est avant tout mobilisé pour provoquer de la méfiance envers Huawei. C’est donc moins le comportement de l’entreprise que les États-Unis cherchent ainsi à changer que celui de leurs partenaires et alliés. Instrument d’influence plus que de puissance, le droit apparaît alors davantage comme un outil diplomatique qu’une arme de guerre conventionnelle (lawfare) ou économique (economic lawfare) dans la politique étrangère américaine.