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Nicolas Bouleau, « Au-delà du nomologique », HAL SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), ID : 10.3917/lpe.009.0069
La pensée de l'optimisation, née au siècle des Lumières, exerce encore une forte emprise sur la philosophie de la connaissance. Les savants du 18e siècle avaient tiré grande satisfaction de la découverte de principes généraux théorisant la mécanique newtonienne. Ce fut le début d'une vaste conquête, d'abord avec le principe de moindre action d'Euler et Maupertuis que celui-ci voyait comme l'empreinte de l'Être suprême : " Quelle satisfaction pour l'esprit humain, en contemplant ces lois, qui sont le principe du mouvement et du repos de tous les corps de l'univers, d'y trouver la preuve de l'existence de Celui qui le gouverne ! ". De même que la lumière choisit le plus court chemin optique d'un point à un autre en traversant un dioptre, la trajectoire d'un système mécanique est celle qui minimise l'action. Au 19ème siècle la naissance de l'économie mathématique se fera comme recherche de minimisation de coûts pour la gestion des péages (Jules Dupuit 1944) et dans les équilibres de marché (Léon Walras, Stanley Jevons). Enfin au 20e siècle l'automatique et l'informatique étendrons les méthodes d'optimisation à toute la rationalité appliquée. La démarche est conforme à celle de Descartes, il s'agissait pour celui-ci de découvrir des lois édictées par Dieu, et s'il y a loi, la réalité occupe une place privilégiée parmi les éventuels. Elle doit donc être insensible à des petites modifications des circonstances, c'està-dire en langage mathématique, être la solution d'un problème de calcul des variations. Autrement dit la science nomologique incite à une compréhension par des raisonnements variationnels d'optimisation. Cependant la chimie de synthèse et la biologie moléculaire ont apporté vers le milieu du 20e siècle une dimension absolument nouvelle où il est question de phénomènes discrets, de combinaisons et de nombres entiers. La rationalité quitte alors le continu, le différentiable, les variations infinitésimales, pour des configurations singulières.