2016
Cairn
Claire de Galembert, « Le « radical », une nouvelle figure de dangerosité carcérale aux contours flous », Critique internationale, ID : 10670/1.7yw86n
La panique morale suscitée par l’attrait de la violence islamiste auprès de la jeunesse est allée de pair avec l’apparition d’une nouvelle figure de dangerosité : celle de jeunes gens qui se radicaliseraient en prison. Pour comprendre quels sont les ressorts et les processus qui font que le « radical », déclaré ou en puissance, s’est imposé dans le langage pénitentiaire comme une catégorie de référence, il convient d’analyser les dispositifs d’étiquetage et de détection qui participent à la construction de ce qui est désigné comme déviant. L’étude des circonstances, du contexte et des acteurs à l’origine de la mise en œuvre d’une politique de détection de ceux qui sont désignés au départ comme des « prosélytes » révèle que les résistances et appropriations hétérogènes de cet outil n’ont pas empêché la catégorie de s’imposer. Le changement terminologique qui s’opère à partir de 2008, via la tentative de substitution au terme « prosélyte » de celui de « radical » ou de « en voie de radicalisation », est symptomatique de l’européanisation de la politique de lutte contre la radicalisation plutôt axée sur une logique de prévention. Reste que l’absence de compréhension partagée de ce qu’est un radical, terme polysémique et flou, prête aux confusions et aux amalgames stigmatisants, exposant tout musulman au soupçon, y compris lorsqu’il cherche à neutraliser le stigmate.