1 janvier 2024
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Rénald Lanfroy, « Réflexions autour du cheminement personnel d'un individu dans la démarche collective de la convention sur la fin de vie », HAL SHS (Sciences de l’Homme et de la Société), ID : 10.3917/civit.052.0029
La fin de vie reste un sujet sensible qui interpelle à différents niveaux : individuel, familial et sociétal. Face à ce phénomène qui invite à interroger le collectif sur une réflexion pourtant éminemment intime et personnelle, le président de la République française a souhaité solliciter la population et constituer in fine un large panel de citoyens représentatifs des diversités culturelles, cultuelles et plus largement politiques. L’objectif était dans un temps réflexif d’évaluer le cadre législatif relatif à l’accompagnement de la fin de vie au regard des diverses situations rencontrées et de suggérer des changements le cas échéant. Chaque participant aura pu apporter son vécu, recevoir une information éclairée, débattre et envisager des perspectives d’amélioration. La question qui demeure, et non des moindres, dans un tel débat national qui engage et envisage de réels changements paradigmatiques au sein de notre société, reste de savoir comment un individu peut faire fi de ses propres systèmes de croyances et de ses convictions personnelles pour apporter un regard le plus objectif possible, dénué de tout mouvement émotionnel, voire affectif. Est-ce faisable ? Est-ce même souhaitable ? Pour apporter un éclairage à ces interrogations et définir peut-être mieux comment un individu peut cheminer au sein d’un groupe hétérogène d’individus, il est nécessaire de penser le rapport à la mort dans une culture qui tend à la banaliser tout en la redoutant et qui tente autant que faire se peut de la mettre à distance. Il en est de même concernant la position que nous pourrions qualifier de paradoxale du citoyen qui, à la fois, fait preuve d’un certain désengagement dans les faits politiques, tout en revendiquant une place, un droit de parole, voire un pouvoir décisionnel. C’est exactement le cas dans le sujet qui nous concerne, la fin de vie engendre une complexité de positionnement face à une problématique si sensible. Désir d’autonomie, devoir de solidarité… Comment trouver une position juste dans une société qui exige de la singularité dans un mouvement de masse ? Le cheminement personnel nécessite une remise en cause de principes existentiels – mythe d’invulnérabilité, fantasme d’immortalité – en tenant compte des mouvements psychiques – émotivité, affectivité – présents dans une relation « transféro-contre-transférentielle » précieuse. Le collectif impose par ailleurs un cadre lui aussi ambivalent : il offre un espace réflexif, en ouvrant le débat et sa diffusion médiatique, tout en limitant le champ des possibles avec le risque d’emprise psychologique par un mouvement associatif militant.Ainsi, la fin de vie apparaît comme un sujet à la fois politique et intime. Elle a toujours fasciné et interrogé l’être humain, par son caractère mystérieux, voire supérieur à l’homme. Pouvoir aborder la fin de vie d’autrui nécessite un détachement. Participer à la Convention sur la fin de vie questionne alors certes sur le rapport de l’individu à la mort mais sans doute encore plus sur son rapport à la vie ; à sa vie plus précisément et au sens qu’il souhaite lui donner.