2004
Copyright PERSEE 2003-2023. Works reproduced on the PERSEE website are protected by the general rules of the Code of Intellectual Property. For strictly private, scientific or teaching purposes excluding all commercial use, reproduction and communication to the public of this document is permitted on condition that its origin and copyright are clearly mentionned.
Hélène Jousse, « Impact des variations environnementales sur la structure des communautés mammaliennes et l’anthropisation des milieux : exemple des faunes holocènes du Sahara occidental », Travaux et Documents des Laboratoires de Géologie de Lyon, ID : 10670/1.815ull
Comprendre les mécanismes et les causes de l’évolution culturelle des hommes est un sujet principal de l’archéologie moderne. Le but de ce travail est d’analyser les relations existant entre les changements climatiques holocènes, les hommes néolithiques et les faunes : Comment les mammifères ont ils réagi face à ces changements environnementaux et quel a été leur rôle dans l’évolution de la culture néolithique ? Suite à une phase aride conséquente au dernier maximum glaciaire, l’Afrique de l’Ouest a connu à l’Holocène un épisode humide appelé couramment l’«optimum climatique» centré autour de 8000 ans BP. À partir de 6000 ans BP, la dégradation climatique s’amorce et le climat évolue vers une aridification affectant la structure des communautés fauniques, et conduisant à des changements culturels chez les populations humaines. Parmi la faune associée aux occupations humaines, on reconnaît souvent la présence de crocodiles, poissons, tortues, hippopotames, typiques d’écosystèmes aquatiques, ainsi que les grands ongulés tels que les girafes, éléphants, rhinocéros, buffles et antilopes. Ces dernières regroupent 75 espèces de Bovidae africains, et montrent une forte diversité anatomique liée à leur adaptation à un large spectre environnemental. Leur squelette postcrânien a fait l’objet d’une description anatomique précise afin de définir un nouveau guide de détermination pour les espèces ouest africaines. L’étude systématique et biométrique d’un nouveau matériel néolithique complète nos connaissances sur ces faunes holocènes. Les mammifères sont homéothermes et donc étroitement liés à leur biotope, montrant notamment un fort degré de spécialisation. Ils sont utilisés comme donnée proxy pour développer une méthode de reconstitution de la paléovégétation suivant le principe de l’actualisme. Les exigences écologiques des espèces de Bovidae d’Afrique nord équatoriale (incluant antilopes et buffle) ont été définies après discussion de leurs répartitions actuelles. Cette méthode est testée sur le corpus de données climatiques et zoologiques actuelles pour valider son application aux faunes holocènes. Les résultats mettent en évidence des particularités locales à haute résolution temporelle et spatiale, déterminant des zones de refuges permettant aux populations humaines de se maintenir en période d’aridification croissante. L’étude archéozoologique démontre un changement comportemental des hommes en matière d’exploitation animale. Jusqu’aux périodes historiques, cette exploitation est très diversifiée, incluant chasse et pêche, puis activités pastorales à l’Holocène récent. Il s’y trouve encore un gibier largement diversifié, et ce n’est qu’à la transition Néolithique/Protohistoire qu’on documente le déclin drastique de ces faunes. Si impact anthropique sur la faune il y a, il se situe à cette époque, sous une pression démographique et une aridification grandissantes. Les hommes font alors face à ces conditions difficiles de deux façons : soit en migrant vers des zones de refuge où ils maintiendront un certain temps ces diverses activités de subsistance, soit en modifiant leur comportement alimentaire en pratiquant de plus en plus, puis presque totalement, les activités d’élevage.