2014
Cairn
Camille Bui, « L'invention d'une rencontre entre le cinéma et la ville : la « symphonie urbaine » au tournant des années 1930 », Annales de géographie, ID : 10670/1.8bcc63...
Né au cœur de la ville moderne, le cinéma s’est épanoui dans une relation privilégiée avec l’urbain, tant au niveau géographique qu’esthétique. Pour les cinéastes d’avant-garde des années 1920-1930, la métropole fut un milieu propice à la recherche d’un langage cinématographique autonome qui se démarquait de la production divertissante dominante. Dans l’espace de ce texte, nous réinterrogeons le lien du cinéma à la ville dans le moment historique de la modernité culturelle, en nous penchant sur le genre de la symphonie urbaine. À rebours du lieu commun d’une rencontre naturelle entre la ville et le cinéma, nous montrons en quoi ces portraits de ville investissent de manière active les possibilités du médium cinématographique. L’analyse de la mise en scène de l’espace urbain dans ce corpus de films – et particulièrement dans L’Homme à la caméra de Vertov – permet de saisir la manière dont le cinéma se fait agent de la modernité. Il invente et promeut un régime scopique spécifique : un regard omniscient, libéré des contraintes corporelles du citadin ordinaire. Ce régime dominant est cependant troublé par un régime alternatif de représentation où les habitants ont une part active : cette tension performe à l’échelle du film la complexité des dynamiques qui font la ville.